Les mains d’Elsa : commentaire composé

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les mains d'elsa

Voici une analyse du poème « Les mains d’Elsa » de Louis Aragon.

Les mains d’Elsa

Donne-moi tes mains pour l’inquiétude
Donne-moi tes mains dont j’ai tant rêvé
Dont j’ai tant rêvé dans ma solitude
Donne-moi tes mains que je sois sauvé

Lorsque je les prends à mon pauvre piège
De paume et de peur de hâte et d’émoi
Lorsque je les prends comme une eau de neige
Qui fond de partout dans mes main à moi

Sauras-tu jamais ce qui me traverse
Ce qui me bouleverse et qui m’envahit
Sauras-tu jamais ce qui me transperce
Ce que j’ai trahi quand j’ai tresailli

Ce que dit ainsi le profond langage
Ce parler muet de sens animaux
Sans bouche et sans yeux miroir sans image
Ce frémir d’aimer qui n’a pas de mots

Sauras-tu jamais ce que les doigts pensent
D’une proie entre eux un instant tenue
Sauras-tu jamais ce que leur silence
Un éclair aura connu d’inconnu

Donne-moi tes mains que mon coeur s’y forme
S’y taise le monde au moins un moment
Donne-moi tes mains que mon âme y dorme
Que mon âme y dorme éternellement.

Les mains d’Elsa, Aragon : commentaire littéraire

I-  Un poème en forme de prière

On retrouve dans ce poème les caractéristiques d’une prière :

Les nombreuses anaphores (répétition d’un même terme en début de vers) qui insistent sur la demande du poète : « donne-moi » (répété 5 fois), « lorsque », « sauras-tu ».

Cette prière/insistance transparait également à travers l’emploi de l’impératif : donne-moi.

Cette insistance est telle qu’elle apparaît proche de l’obsession. Néanmoins, les anaphores créent une certaine musicalité dans le texte et suggèrent ainsi également l’harmonie du sentiment amoureux.

On retrouve enfin les caractéristiques d’une prière à travers les formules interrogatives que l’on entend, malgré l’absence de ponctuation, à travers l’inversion sujet-verbe aux vers 9 et 11 (« sauras-tu jamais »)

II- Des images poétiques fortes

L’image des mains est centrale dans le poème (elle lui a donné son titre). Les mains apparaissent comme un instrument multiple:

Tout d’abord, elles représentent un instrument de liaison entre Aragon et Elsa, ce que suggère le glissement du déterminant possessif « tes mains » à « mes mains » puis à « tes mains » à la fin du poème.

Elles sont un véritable moyen de communication. La strophe 4 érige les mains en un moyen de communication d’autant plus puissant qu’il est muet. On remarque le champ lexical du langage dans cette quatrième strophe : « profond langage », « parler muet », « sens », « sans bouche », « mots » .

Les mains sont également salvatrices. C’est ainsi que les mains d’Elsa sauvent le poète de la noyade (« que je sois sauvé »).

Mais la figure plus négative du piège se superpose également sur celle des mains. On observe le champ lexical du piège : « je les prends », « piège », « proie », « tenue ».

Néanmoins, c’est l’image positive des deux mains qui se rejoignent et forme un cœur qui perdure à la fin du poème. Les mains deviennent le lieu de l’apaisement (remarquez le champ lexical du silence « s’y taise », « âme », « dorme » ;  et le dernier mot du poème qui suppose l’amour infini : « éternellement » ).

III-  Insécurité et angoisse du poète

Véritable poème d’amour, Les mains d’Elsa suggère néanmoins par touche l’imperfection du sentiment amoureux et la fusion jamais atteinte des amants.

Tout d’abord, on relève le champ lexical de l’inquiétude et de l’instabilité : « inquiétude », « solitude », « hâte », « émoi », « traverse », « bouleverse », « transperce », « trahi », « tressailli ». L’amour n’apparaît jamais totalement acquis. Il devient alors source d’incertitude, de peur, de jalousie et de souffrance.

Ensuite, si Aragon souhaite posséder Elsa, ce qu’il suggère à travers l’image du « piège » (vers 5), il sait que cette possession n’est qu’illusoire. La comparaison entre les mains et l’eau de neige qui fond traduit cette impossibilité de retenir l’être aimé.

La communication entre les amants passe par des non-dits (champ lexical du silence : « muet », « sans bouche », « pas de mots », « s’y taise ») et n’est jamais sûre d’être totalement comprise.  C’est ainsi qu’il faut comprendre les nombreuses interrogations d’Aragon introduites par l’anaphore « sauras-tu jamais ». Le poète sait que le partage absolu entre deux être est impossible et il souffre de cette communion imparfaite.

Enfin, les figures d’insistance dans le poème (anaphores), l’emploi de l’impératif suggère également le côté plus sombre de l’amour qui se fait envahissant, autoritaire, possessif.

On note toutefois que l’antithèse finale moment/éternellement (l’antithèse est le rapprochement de deux mots de sens opposés) suggère la victoire de l’apaisement sur celle de la peur et de l’incertitude.

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