Aux élèves qui me demandent des conseils de lectures « plaisir », je n’hésite pas à recommander Gaël Aymon, un écrivain jeunesse né en 1973.
Ses romans « jeunes adultes » comme Golden Valley, Oublier Camille, La planète des 7 dormants ont tous obtenu de nombreuses récompenses.
Son prochain roman, Et ta vie m’appartiendra, sort le 19 mars 2020.
Gaël Aymon nous fait partager son univers dans cet entretien réalisé en décembre 2019.
Gaël Aymon, pouvez-vous vous présenter ?
Je suis Gaël Aymon. J’ai été acteur, réalisateur, producteur audiovisuel. Je ne me destinais pas à l’écriture et pourtant, depuis 2010, elle m’a accueilli et je m’y sens à ma place. Je me présente souvent comme écrivain « pour la jeunesse et adultes consentants ». Je m’adresse en effet avant tout à un public enfant, ado ou jeune adulte, selon les livres. Mais la littérature jeunesse n’est pas interdite aux adultes.
Quels sont les livres qui ont exercé une profonde influence sur vous ? Les auteurs pour qui vous avez eu un coup de foudre ?
Depuis l’enfance, l’influence ce sont les contes, qu’ils soient des Frères Grimm, de Charles Perrault, Pierre Gripari, Alan Garner ou médiévaux.
Ado, je lisais peu. Howard Buten, « Dune » de Frank Herbert et pas mal de BD.
Adulte, côté coups de foudre, « King Kong Theory » de Virginie Despentes, « Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur » de Harper Lee… Plus récemment, « How not to be a boy » de Robert Webb, ou « Silo » de Hugh Howey.
Aimiez-vous la lecture de classiques au lycée ou votre goût pour la littérature s’est-il développé plus tard ?
Malheureusement, comme beaucoup d’ados, les lectures prescrites à l’école avaient sur moi un effet repoussoir ! Le métier de professeur.e de français doit être vraiment difficile ! J’avais quasiment arrêté de lire au collège. Au lycée, je me souviens avoir apprécié certaines lectures du programme, comme Barjavel ou Zola, mais ce sont des souvenirs très flous. Certains profs n’apprécient pas que je le dise à leurs élèves. Pourtant je trouve important de ne pas se coller des étiquettes dès le plus jeune âge, et savoir qu’on peut être, en une seule vie, lecteur puis plus du tout, puis un peu, puis de nouveau plus, et finalement devenir écrivain !
C’est aux Cours Florent, quand j’ai commencé ma formation de comédien, que j’ai adoré découvrir à voix haute le théâtre de Musset, Hugo, Bruckner, Feydeau ou Cyrano.
Depuis que je suis auteur, je lis beaucoup plus mais j’ai encore d’énormes lacunes classiques. Je le vois positivement : cela veut dire qu’il me reste encore beaucoup de grands auteurs à découvrir !
Pouvez-vous nous parler de votre dernier ouvrage ?
« Et ta vie m’appartiendra », qui paraitra en mars 2020, est un thriller « jeune adulte » qui puise justement ses racines dans mes deux années de fac de Lettres Modernes, durant lesquelles j’avais dû lire « La peau de chagrin » de Balzac. J’ai toujours eu envie de m’emparer de ce mythe : un talisman maléfique exhaussant tous les désirs de sa victime en lui pompant sa vie jusqu’à la faire mourir.
Il m’a fallu plus de vingt ans, des dizaines de projets, et de nombreux manuscrits, pour parvenir à m’approprier cette peau de chagrin, lui faisant faire irruption dans la vie de deux jeunes filles d’aujourd’hui, pour questionner le sens de la vie, le désir, la richesse, mais aussi jouer à mettre en abime la vie de Balzac, l’intrigue de son roman, et celle du mien !
Quels sont vos thèmes de prédilection ? Sur quoi aimez-vous écrire ?
J’aime me laisser porter par l’envie sans trop me l’expliquer. Un personnage, une ambiance, un rythme qui m’appellent et s’imposent.
Je fuis l’ennui et la routine, j’aime donc changer d’âge de lectorat, de genre, de rythme.
Je n’aime pas non plus l’idée de devoir répondre à l’attente supposée d’un lectorat. La littérature jeunesse me permet de déjouer partiellement ce piège puisque mes lecteurs grandissent et m’oublient, tout comme ils se renouvellent sans cesse.
Quant à des thèmes de prédilection, j’évite de faire de mon travail mon propre objet d’analyse, mais je crois que je questionne souvent les normes, entre autres les normes de genres, la mort, l’amour et le sens de la vie. J’écris avec ce que je suis et les questions qui m’habitent depuis toujours, en essayant de ne pas imposer des idées, donner des recettes, ni faire de didactisme. Écrire pour la jeunesse, ce n’est pas la prendre de haut, mais lui proposer d’expérimenter la littérature autrement, de s’ouvrir à l’altérité et l’empathie, et tenter de lui offrir des bases de réflexions personnelles.
Comment organisez-vous vos journées d’écriture ? Avez-vous certaines habitudes d’écriture ?
Comme beaucoup d’auteurs jeunesse, je passe une grande partie de l’année dans les trains, les classes, les CDI, les salons du livre et les hôtels. Durant ces périodes, je travaille en pointillé et surtout dans les trains, sur ordinateur. Le reste du temps, je travaille très classiquement, chez moi, sur ordinateur, à mon bureau, durant les horaires d’école de mes filles.
Mais l’écriture n’est que la partie émergée de l’iceberg. Ce métier ne s’arrête jamais. Le cerveau est sans cesse en activité, me rendant parfois absent à ce que je vis, ou me privant de sommeil les nuits.
Quels sont vos projets littéraires ? Travaillez-vous sur un manuscrit actuellement ?
Ils sont si nombreux que mon crâne est une salle d’attente encombrée de projets impatients que je dois réfréner !
Le temps éditorial n’est pas linéaire, les différentes étapes de travail de plusieurs projets se chevauchent constamment. Je corrige actuellement la dernière version d’un roman ado réaliste qui paraitra en octobre 2020, en même temps que j’entame l’écriture d’un roman de Science Fiction assez différent de mon premier, « La planète des sept Dormants » paru en 2018. Je travaille aussi sur le tome 8 d’une série de romans illustrés pour les 8-10 ans, « Les Grandes années », ainsi que sur deux contes.
On pourrait croire que je suis très productif mais, en réalité, les parutions de tous ces projets seront échelonnées sur plusieurs années.
Merci Gaël Aymon !
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