On ne badine pas avec l’amour, Musset : fiche de lecture

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Voici une fiche de lecture complète (avec résumé et analyse de l’oeuvre) sur On ne badine pas avec l’amour, pièce écrite par Alfred de Musset en 1834.

Cette pièce est au programme du bac de français avec le parcours « Les jeux du coeur et de la parole » .

On ne badine pas avec l’amour reprend un thème cher à Musset : celui du sentiment amoureux dont l’écrivain s’efforce d’analyser, dans toute son œuvre, les subtilités et les pièges.

Lorsqu’il écrit cette pièce en 1834, il est plongé dans la douleur de sa rupture avec Georges Sand, dont il aurait même incorporé certains extraits de la correspondance dans la pièce.

Mais surtout, avec On ne badine pas avec l’amour, Musset se positionne en faveur des romantiques, dans le débat esthétique qui les oppose aux défenseurs du théâtre classique depuis la bataille d’Hernani, 4 ans plus tôt.

On ne badine pas avec l’amour : analyse en vidéo

Analyses linéaires sur On ne badine pas avec l’amour :

Dissertation :

Qui est Musset ?

Poète, romancier et dramaturge romantique, Alfred de Musset est l’un des auteurs qui incarne le plus le « Mal du siècle », cet état de mélancolie et de désillusion qui touche une génération dont le désir d’absolu et d’héroïsme est broyé par les échecs des révolutions du XIXème siècle (1830 puis 1848).

Sa relation passionnée et orageuse avec l’écrivaine George Sand le marque profondément et influence ses œuvres les plus célèbres comme la pièce On ne badine pas avec l’amour (1834), le roman autobiographique Confessions d’un enfant du siècle (1836) et le recueil poétique Les Nuits (1835-1837).

Comment résumer On ne badine pas avec l’amour ?

Acte I

Dans l’acte I, le Baron se réjouit de marier son fils Perdican, qui vient de finir ses études, avec sa nièce Camille, qui a été élevée au couvent.

Les deux jeunes gens s’aiment tendrement depuis l’enfance mais ne se sont pas vus depuis plusieurs années.

Or lors de leurs retrouvailles, Camille oppose à son prétendant une froideur implacable.

Pour susciter sa jalousie, Perdican se tourne alors vers Rosette, la sœur de lait de Camille.

Acte II

Dans l’acte II, Camille affirme vouloir devenir religieuse.

Face à Perdican qui tente de l’en dissuader, elle blâme la fragilité de l’amour marital comparé à la constance de l’amour divin.

En parallèle, Maître Bridaine, le curé, se désole de la place qui lui est accordée au repas chez le Baron, par rapport à Maître Blazius, le gouverneur de Perdican, et décide de quitter le dîner.

Quant à Maître Blazius, il informe le Baron que Camille a confié à sa gouvernante, Dame Pluche, une lettre, certainement destinée à un amant.

Acte III

Dans l’acte III, Perdican parvient à intercepter la lettre.

Dans cette correspondance adressée en réalité à sœur Louise, Camille confie l’effondrement de son prétendant suite à son refus de se marier.

Piqué dans son orgueil, le jeune homme organise un rendez-vous avec Rosette et y convie Camille, cachée derrière un arbre.

Il tient alors un double discours visant à séduire Rosette et blesser Camille.

Mais cette dernière contre-attaque. Elle enjoint Rosette de se cacher derrière un rideau et s’entretient avec Perdican, qui finit par lui avouer son amour. Rosette s’évanouit.

Blâmé par Camille, le jeune homme s’engage à épouser la paysanne.

Dans la dernière scène, Perdican et Camille finissent par s’avouer mutuellement leur amour. Rosette, qui les entend, pousse un cri et meurt. Camille part définitivement. 

Quels sont les thèmes importants dans On ne badine pas avec l’amour ?

L’amour

L’amour est le thème majeur de la pièce, au point de lui donner son titre.

Il se décline sous différentes formes.

Tout d’abord, Camille et Perdican sont animés par un amour d’enfance sincère que l’orgueil les empêche d’exprimer pleinement.

Cet amour d’enfance est concurrencé par l’amour divin, symbolisé par le désir de Camille de devenir religieuse. En effet, la jeune femme craint l’inconstance de l’amour humain et se tourne donc vers l’amour divin, qu’elle juge absolu.

L’amour apparaît enfin sous la forme du libertinage, lorsque Perdican séduit Rosette pour susciter la jalousie de Camille. Mais cet amour insincère et stratégique est dangereux : il causera la mort de Rosette et la séparation définitive de Perdican et Camille, illustrant le proverbe du titre « On ne badine pas avec l’amour ».

L’orgueil

L’orgueil, cet amour excessif de soi, empêche l’amour de l’autre et la sincérité des sentiments.

C’est pourquoi Camille qui n’oppose que froideur à Perdican, est pourtantpiquée à vif lorsque le jeune homme se tourne vers Rosette. Perdican, vexé par Camille, met en place un stratagème qui sera fatal à Rosette.

Même les personnages secondaires sont touchés par l’orgueil, telle curé, Maître Bridaine, heureux de la disgrâce de Maître Blazius qui lui permet d’être mieux assis à table, ou le Baron qui refuse la mésalliance entre son fils et Rosette (Acte III, scène 7).

De ce point de vue, la tirade de Perdican à l’acte II scène 5 s’inscrit dans le sillage des moralistes du XVIIème siècle tels La Rochefoucauld ou Pascal, qui dressent un tableau sombre des hommes :

« Tous les hommes sont menteurs, inconstants, faux, bavards, hypocrites, orgueilleux ou lâches, méprisables et sensuels ; toutes les femmes sont perfides, artificieuses, vaniteuses, curieuses et dépravées […] »

La religion

La religion est vivement critiquée dans cette pièce.

Perdican va jusqu’à la comparer à un poison incitant à renoncer au monde : « ces récits hideux qui t’ont empoisonnée ».

Quant aux membres de l’ordre religieux, ils sont tous tournés en dérision.

Maître Bridaine, amateur de bonne chère, semble plus préoccupé des plaisirs du monde que de la foi et la bigote Dame Pluche est comparée par le Choeur à une maladie : « Dame Pluche, vous arrivez comme la fièvre, avec le vent qui fait jaunir les bois », (Acte I, scène 1).

On note toutefois que les envolées lyriques de Perdican font souvent entendre une rhétorique religieuse : « Orgueil ! Le plus fatal des conseillers humains, qu’es-tu venu faire entre cette fille et moi ? » (Acte III, scène 8) ;  « Tu nous l’avais donné, pêcheur céleste, tu l’avais tiré pour nous des profondeurs de l’abîme » (Acte III, scène 8) comme si le langage religieux permettait malgré tout de toucher la profondeur de l’âme.

Quelles sont les caractéristiques de l’écriture dans cette pièce ?

Musset fait preuve d’une très grande liberté d’écriture dans cette pièce.

En empruntant autant à la comédie qu’à la tragédie, en mêlant scènes sérieuses et cocasses, et en faisant fi de la règle classique des trois unités, notamment par la multiplication des lieux, il inscrit sa pièce dans le genre hybride du drame romantique, théorisé par Victor Hugo dans la Préface de Cromwell, manifeste de en 1827, et qui a donné lieu à un affrontement, en 1830, entre partisans du théâtre classique et partisans du drame romantique, lors de la bataille d’Hernani.

Les personnages de Musset incarnent également des héros romantiques, en quête d’idéal et d’absolu, doués d’une sensibilité exacerbée mais incapables d’être heureux.

Que signifie le parcours « Les jeux du cœur et de la parole » ?

Le cœur et la parole donnent lieu à de véritables jeux entre les personnages.

En effet, la parole ne constitue pas le miroir des sentiments et permet même parfois de les occulter.

Couramment, ces jeux du cœur et de la parole relèvent du badinage amoureux : ils sont considérés comme légers et plaisants. Mais peut-on en dire autant dans cette pièce ?

La fin tragique, tout comme le proverbe qui donne son titre à la pièce, On ne badine pas avec l’amour, soulignent que le badinage amoureux est plus dangereux qu’il n’y paraît !

On ne badine pas avec l’amour met en scène des jeux complexes entre le cœur et la parole.

La parole n’est pas le miroir du coeur

Tout d’abord, la parole n’est pas le miroir du cœur. Elle est au contraire un masque permettant de cacher ses sentiments.

Camille évoque elle-même ce rôle joué par les femmes :

« Connaissez-vous le coeur des femmes, Perdican ? Êtes-vous sûr de leur inconstance, et savez-vous si elles changent réellement de pensée en changeant quelquefois de langage ? Il y en a qui disent que non. Sans doute, il nous faut souvent jouer un rôle, souvent mentir » (Acte III scène 6)

Ce comportement, qui utilise le langage pour cacher l’amour naissant, fait songer à celui de la « coquette », très présente dans le théâtre de Marivaux, dramaturge du XVIIIème siècle qui, dans ses pièces La Double Inconstance (1723) et Les Fausses Confidences (1737), analysait déjà les subtilités du langage de la séduction.

Tout le nœud de l’action réside d’ailleurs dans le refus de Camille d’accorder sa parole à son cœur.

Alors qu’elle aime Perdican depuis l’enfance, son langage ne lui oppose que froideur et insensibilité, comme le soulignent les nombreuses négations à l’acte I, scène 3 : « Je n’en ai nulle envie », « Non, pas ce soir », « Je ne suis pas assez jeune […] ni assez vieille pour aimer le passé ».

La parole est également un jeu, du moins un stratagème, lorsqu’elle vise à séduire celle pour qui le cœur n’a pas de sentiment.

Ainsi, Perdican éblouit Rosette avec des métaphores galantes et artificielles qui captivent la jeune paysanne : « De tout ce qui te plaira, de tout ce qui peut passer sur tes lèvres sans leur ôter ce sourire céleste que je respecte plus que ma vie. » (Acte II, scène 3)

Mais le badinage amoureux est un jeu dangereux

Les jeux du cœur et de la parole donnent aussi lieu à un jeu du chat et de la souris, où chaque personnage essaie de traquer les sentiments de l’autre derrière les subtilités du langage.

C’est ainsi que l’on peut analyser les affrontements verbaux entre Camille et Perdican : chaque personnage tente de faire avouer à l’autre ses sentiments.

Par exemple, à l’acte II, scène 1, Camille sonde le cœur de Perdican : « Je suis bien aise que mon refus vous soit indifférent ». Le jeune homme avoue son amour « Ton amour m’eût donné la vie » tout en sauvant son amour-propre par une boutade « mais ton amitié m’en consolera ». Ces échanges ironiques font songer au théâtre de Marivaux.

À une différence près : chez Marivaux, les échanges amoureux, plaisants et légers, aboutissaient à une levée des masques permettant de faire triompher l’amour. Chez Musset, les conséquences sont tragiques, illustrant le proverbe du titre On ne badine pas avec l’amour.

En effet, quand les deux jeunes gens s’avouent leur amour dans la dernière scène, le langage exprimant enfin ce que dit le cœur, la mort de Rosette vient anéantir tout bonheur possible.

Le jeu amoureux, léger chez Marivaux, engendre des conséquences terribles chez Musset. Les personnages qui s’y adonnent sont punis pour leur orgueil démesuré, et Rosette, victime innocente, est tragiquement sacrifiée.

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Qui suis-je ?

Amélie Vioux

Professeure et autrice chez hachette, je suis spécialisée dans la préparation du bac de français (2nde et 1re).

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