Éric Simard, écrivain pour la jeunesse

Éric Simard est un écrivain jeunesse né en 1962.

A 23 ans, il obtient un diplôme de biochimie mais part travailler dans une librairie, puis comme intervenant dans une maison d’arrêt.

La rencontre avec un poète grec lui donne envie d’écrire. Depuis, Eric Simard est l’auteur de nombreux romans pour la jeunesse.

Voici un entretien réalisé avec Éric Simard en janvier 2020.

Éric Simard, quels sont les livres qui vous ont influencé ?

D’abord ceux que j’ai découverts au lycée : Baudelaire, Rimbaud surtout. Plus tard, René Char, Yannis Ritsos, Jacques Prévert, récemment Gaston Miron avec sa « Marche à l’amour » (je vous recommande sa lecture par JL Trintignant). Des poèmes comme des brûlures.

Mais à l’adolescence, je continuais de préférer les terrains de sport où se construisaient mes rêves de basketteur professionnel. Je pense que je n’aurais jamais eu la prétention d’intéresser mes contemporains avec des textes si je n’avais pas rencontré à vingt-deux ans le poète et romancier grec Demosthènes Davvetas. J’ai découvert grâce à lui que l’écriture pouvait embraser, libérer, cautériser aussi. J’ai utilisé ce langage artistique pour exprimer les souffrances d’un deuil que je venais de vivre.

Quel est votre rapport à la lecture ?

Je ne suis pas un homme de lettres, plutôt un homme pressé qui écrit.

Je ne lis pas beaucoup, sans doute parce que je me sais influençable. Je crains de m’imprégner comme une éponge des textes qui vont me marquer.

Le fait est que je n’ai jamais beaucoup lu. L’attention soutenue, la concentration longue n’ont jamais été mon fort. J’ai commencé à lire parce qu’on m’y invitait ou qu’on me l’imposait au cours de mes études. La grande majorité des romans que je devais lire au lycée ne m’intéressait pas. L’obligation de les lire m’a braqué et j’ai réagi en abandonnant cette activité. Mais j’ai vécu heureusement des chocs littéraires grâce à des poètes qui m’ont transformé.

Sur quoi aimez-vous écrire ?

Un grand nombre de mes textes abordent le thème des manipulations. Manipulation des consciences par les mensonges et la propagande, manipulation de l’esprit par les rumeurs et les croyances, manipulation des corps par la génétique et la chirurgie déviante.

J’aime explorer la fragilité de mes personnages, étoffer leur originalité, explorer leurs origines. L’appel au respect des autres dans leurs différences transpire dans presque tous mes textes.

Avez-vous certaines habitudes d’écriture ?

Je pourrais vous confier mes habitudes d’écriture mais ça n’a pas vraiment d’importance. Chaque auteur se démène comme il le peut entre sa vie au quotidien et ce moment retiré où il va chercher dans son for intérieur ce qui le bouleverse et pourrait (prétend-il au fond de lui-même) toucher les autres.

Il n’y a pas de recette, juste une sorte de « nécessité » qu’il faut laisser venir à soi sans essayer de comprendre pourquoi ni comment elle survient. C’est un autre espace-temps où j’ai le sentiment que les masques tombent, que je me rapproche au plus près de ce que je suis. C’est à la fois délicieux et déstabilisant.

Je constate qu’il existe des rencontres qui déclenchent mes désirs d’écriture. Combien de fois ai-je écrit après avoir vu un film, après avoir contemplé une peinture, écouté une musique, rencontré une personne qui me touche, où dans la foulée d’un rêve.

Quels sont vos projets littéraires ?

Je crée plusieurs textes en même temps car je me lasse vite d’un univers que je commence à trop bien connaître. C’est ma nature et je fais avec. Je rebondis donc d’une fiction qui se déroule dans le futur vers un texte historique, ou vers un album pour les petits. On n’est jamais certain d’aller au bout et je conserve dans mon ordinateur de nombreux textes inachevés.

Pêle-mêle, je peux vous citer mes projets actuels : une biographie d’Alexandre le Grand, un texte humoristique sur un dictateur extra-terrestre qui découvre la Terre, une biographie poétique de Dian Fossey l’amie des gorilles assassinée par des braconniers, un roman d’anticipation, des textes pour la série des humanimaux qui en contient déjà neuf.

Je dois signaler une nouvelle publiée il y a de nombreuses années et qui s’intitule « Clarisse ». Elle a été rééditée dans une anthologie aux éditions Hatier sur le thème « Faut-il avoir peur du progrès ».

Cette nouvelle me permet de vous préciser qu’après avoir renoncé à devenir basketteur professionnel, j’ai misé sur une carrière scientifique et j’ai obtenu un diplôme d’ingénieur biochimiste. J’avais vingt ans et mon côté scientifique l’emportait alors sur mon côté artiste. Cette formation que je n’ai jamais exploitée dans ma vie professionnelle, je l’ai utilisée dans ma vie d’auteur, d’où mes penchants pour les textes d’anticipation où la génétique joue un rôle prépondérant. Je tente souvent de trouver une ligne originale entre la science et la poésie, préférant l’expression « émoscience » à « science-fiction ». Le série des « Cycle des Destins » où je mets en scène un Paris sous la mer en est une expression particulière.

Pouvez-vous nous parler de votre dernier ouvrage ?

« La chanson interdite » publié aux éditions Oskar fait partie des derniers textes que j’ai écrits. L‘histoire se déroule au début du vingtième siècle. Voici sa quatrième de couverture :

« Jean, fils de paysans du Forez, est une graine de poète. Le destin ne l’épargne pas et le conduit, orphelin, dans la région de Thiers. Là, il partage son temps entre la mise au tranchant des couteaux auprès d’Auguste l’émouleur, et la mise en chanson de ses humeurs. Gueulards, râleurs, durs à l’effort, les émouleurs forgent sa conscience d’homme libre face aux pressions des patrons. Ciseleur de vers, Jean apprend à crypter sa poésie dans l’élan d’un amour interdit. Mais soudain survient la Grande Guerre. Après les carnages des offensives ratées, Jean et d’autres soldats remettent en cause les décisions du commandement. S’élève alors dans les tranchées une chanson de colère et de révolte : La chanson de Craonne. »

Voilà, je vous ai presque tout dit, le reste est dans mes livres. Je retourne à mes poèmes…

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