Pour un oui ou pour un non, dénouement : analyse

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Voici une analyse linéaire du dénouement de Pour un oui ou pour un non de Nathalie Sarraute.

L’extrait étudié va de « A quoi bon s’acharner ? » à la fin de la pièce.

Pour un oui ou pour un non, dénouement, introduction

Dans Pour un oui ou pour un non, pièce écrite en 1982, Nathalie Sarraute met en scène deux amis H1 et H2 qui se disputent pour un motif apparemment futile.

Mais au fil de la pièce, les échanges laissent apparaître deux tempéraments opposés.

Cette pièce, comme une séance de psychanalyse, fait affleurer l’inconscient, le moi pulsionnel qui se cache derrière les interactions apparemment anodines de l’amitié. (Voir la fiche de lecture sur Pour un oui ou pour un non)

La scène qui précède est une lutte à mort verbale et psychologique entre les deux personnages.

Ces sont deux visions du monde qui les oppose apparaissent désormais inconciliables.

Dans le dénouement de la pièce, H1 et H2 se retrouvent devant cette évidence : leur amitié, peut-être même toute amitié, n’est qu’une illusion.  

Problématique

Comment ce dénouement, en révélant le sens véritable du titre de la pièce, fait-il la critique d’une société matérialiste, insensible à l’inconscient et au sens caché du langage?

Plan linéaire

Dans un premier temps, la rupture semble suspendue car une complicité réapparaît entre les deux amis.

Dans un second temps, H2 et H1 imaginent le procès que leur ferait la société.

Enfin, dans un troisième temps, Nathalie Sarraute révèle le sens véritable du titre de la pièce.

I – Une rupture en suspension

De « À quoi bon s’acharner » à « Un silence »

Le silence signalé par la didascalie est révélateur d’une évidence : la rupture entre les deux amis semble consommée.

H1 ne trouve plus les mots et commence par la locution « A quoi bon ». Cette dernière renvoie à une posture quasi philosophique : devant l’absurdité de cette amitié, qui n’est qu’une illusion, mieux vaut y renoncer.

Le verbe « acharner » suggère bien cette action toujours recommencée. Il rappelle le mythe de Sisyphe utilisé par Albert Camus pour démontrer l’absurdité de la condition humaine.

L’échange entre les deux personnages devient alors plus serein.

Les trois points de suspension qui ponctuent chaque phrase suggèrent en effet un apaisement dans le ton et dans les mots.

Les comparatifs de supériorité et les superlatifs (« plus sain », « plus salutaire » « La meilleure solution ») se rattachent à un lexique médical. La polysémie du terme « solution » renvoie aussi à un produit pharmaceutique. C’est comme si les deux personnages ont diagnostiqué une amitié toxique et tentent de s’en guérir.

Mais leurs échanges laisse réapparaître une forme de complicité comme le montre l’utilisation des pronoms personnels « Mais tu sais bien comment nous sommes » : le « nous » réapparaît alors que le « je »  et le « tu » semblaient irrémédiablement séparés dans les pages précédentes.

À travers la locution verbale « j’ai besoin », H2 ouvre de nouveau l’espace de l’intimité et de l’amitié.

La réponse de H1 « Et moi donc » accentue ce rapport de coopération entre les deux personnages.

La proposition « tu me connais » suggère la fin de la rivalité entre le « je » et le « tu » comme si les deux personnages étaient à nouveau fongibles dans un même monde, comme si leur vision finissait par se rejoindre.

Le silence qui suit est néanmoins lourd de sens. Il semble exprimer l’échec de cette réparation.Les deux personnages semblent happés par le silence, toute parole demeurant inutile.

II – Le procès de la société

De « Qu’est-ce que tu crois…si on introduisait une demande » à « Pour un oui…ou pour un non ?»

Les deux personnages sont néanmoins tentés par la reconstruction de leur amitié. La conjonction de subordination « si » suivie de l’irréel du présent si on introduisait une demande ») vient imaginer une solution au conflit.

Un pacte nouveau semble possible entre H1 et H2 comme le montre l’utilisation de la première personne du pluriel « à nous deux » qui sort les personnages du face à face, du 1 contre 1.

H1 s’apprête à entrer dans un procès imaginaire où il cherche à être l’avocat de cette amitié défunte. Par l’emploi des adverbes comparatifs de supériorité (« mieux expliquer », « plus de chances »), H1 pense qu’il peut y avoir une amélioration qualitative de cette amitié qui n’est pas encore perdue.

H2 donne une fin de non-recevoir par l’adverbe de négation « Non » et reprend à son compte l’expression de H1 « à quoi bon ? ».

Les deux personnages deviennent similaires à Vladimir et Estragon dans En attendant Godot de Samuel Beckett, pris par le sentiment de l’absurde et l’inanité de toute chose.

H2 entre dans le jeu du procès imaginaire de H1 en désignant par la troisième personne du pluriel Je vois leur air ») des spectateurs de leur plaidoirie imaginaire.

Les guillemets signalent une parole rapportée, celle de jurés imaginaires qui auraient pour fonction de qualifier la relation entre H1 et H2 en lisant leur « dossier » : amitié ou hostilité ?

H2 reprend point par point les éléments saillants de leur confrontation et de leur vision opposée du monde qui sont apparus au fil de la pièce : « quelles taupes ? Quelles pelouses ? Quels sables mouvants ? Quels camps ennemis ?« . Dit ainsi, ces termes apparaissent insignifiants et le motif de la dispute dérisoire renvoyant au titre de la pièce Pour un oui ou pour un non.

Les jurés imaginaires réalisent une investigation comme le soulignent les verbes « chercher », « examiner » mais seul le pronom indéfini « rien » résonne comme un verdict.

Ces jurés imaginaires représentent l’opinion commune, rationnelle qui n’a pas accès aux subtilités de l’inconscient et du sens caché.

Ils représentent les préjugés moraux : « Et ils demandent à rompre. Ils ne veulent plus se revoir de leur vie… quelle honte … » Le terme « honte » souligne que la société n’est qu’un tribunal permanent, toujours disposé à former des jugements moraux sans appel.

H1 reprend le verdict sous forme de phrases nominales : « Oui aucun doute possible, aucune hésitation : déboutés tous les deux ». Le caractère affirmatif de ces phrases nominales caricature la certitude morale de la société qui n’a pas accès aux nuances de l’inconscient et à la complexité de la psychologie humaine.

H2 poursuit en singeant ces préjugés. Le champ lexical judiciaire (« peines », « encourent », « signalés », « prudence », « coupables ») indique que la société est un véritable tribunal, non pas bienveillant mais prêt à condamner tous ceux qui s’écartent des règles morales ou communément admises.

Le terme de « prudence » qui est la vertu suprême de la justice entre en consonance rimique avec « méfiance », ce qui montre que la prudence ne correspond plus à un sens aigu de la justice mais à un refus de l’autre.

De même, par l’effet de rime entre « capables » et « coupables », Nathalie Sarraute souligne que la société dresse un réquisitoire contre les personnes qui se mettent en marge des conventions sociales : « ils peuvent rompre pour un oui ou pour un non ».

La dramaturge reprend à la fin de cette scène le titre de la pièce dans un effet de mise en abyme.

III – Le sens véritable du titre de la pièce

De « Oui ou non ? » à « Non !« 

« Pour un oui ou pour un non » est une parole rapportée de ce procureur imaginaire, joué par H2, qui condamne la séparation des deux amis. Cette locution adverbiale signifie donc ici « sans raison apparente », « sans raison solide » et « de manière légère ou désinvolte ». Cette expression condamne donc la rupture des deux amis, car elle aurait lieu sans raison.

Mais il s’agit de la part de Nathalie Sarraute d’une critique contre une société bourgeoise, matérialiste et superficielle qui ne tient pas compte dans ses jugements des effets subtils de l’inconscient, des tropismes, des conflits cachés qui n’affleurent pas toujours à la surface du langage.

Le « rien » que voit la société bourgeoise est en fait chargé de sens, de sous-entendus. Toute la pièce a permis de donner de la consistance à ce qui paraissait n’être que broutilles.

Nathalie Sarraute sort alors de la locution adverbiale stéréotypée « pour un oui ou pour un non » pour lui rendre son sens originel comme le dit H1 qui casse littéralement l’expression pour faire résonner le oui et le non : « Pour un oui … ou pour un non ? ».

Les trois points viennent segmenter la locution adverbiale qui perd de ce fait son sens précédent. Le silence qui suit fait entendre distinctement l’opposition entre le « oui » et le « non ».

A travers H1 et H2, la pièce a en effet montré l’opposition entre un « oui » et un « non ».

H1 est le porteur de ce « oui » par les concessions qu’il n’a cessé de faire à la morale bourgeoise, à la rationalité, aux convenances de la société.

H2, par son ton souvent révolté, est le porteur de ce « non ».

H2 considère que « oui » et « non » sont les symboles de deux visions du monde inconciliables et totalement exclusives l’une de l’autre : « En effet. Oui. Ou non. ».

Les deux dernières prises de parole sont représentatives des deux personnages. H1 dit un « oui » posé, à l’image de son attitude durant toute la pièce. H2, lui, lance un « Non ! » sous la forme d’une phrase exclamative qui montre une attitude de révolte et de rejet de toute compromission.

Le « Non ! » de H2 est la dernière voix qui se fait entendre. Peut-être ce dénouement fait-il entendre la capacité de l’homme à se révolter et à maintenir un cap malgré tous les obstacles intérieurs, psychologiques ou moraux, qui se dressent devant lui.

Pour un oui ou pou un non, dénouement, conclusion

Dans cette scène de dénouement, Nathalie Sarraute donne le sens véritable du titre de sa pièce.

Le Pour un oui ou pour un non initial semblait réduire le motif de dispute entre les deux amis à quelque chose de futile et de superficiel.

En définitive, il s’agit bien d’une opposition frontale entre deux visions du monde, celle qui dit oui aux valeurs matérialistes et bourgeoises de la société contemporaine et celle qui dit non.

Nathalie Sarraute met en scène le déchirement auquel ce choix oblige. De fait, la pièce est plus tragique qu’il n’y paraît car la société paraît fracturée entre deux attitudes inconciliables.

Face aux valeurs montantes de la bourgeoisie matérialiste, il faut choisir, semble nous dire Nathalie Sarraute : c’est « oui » ou c’est « non ».

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Qui suis-je ?

Amélie Vioux

Professeure et autrice chez hachette, je suis spécialisée dans la préparation du bac de français (2nde et 1re).

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