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Voici une analyse du poème « Souvenir de la nuit du quatre » de Victor Hugo.
Souvenir de la nuit du 4, introduction :
« Souvenir de la nuit du 4 » est extrait du recueil Les Châtiments, publié en 1853.
Ecrit en 1852 lors de l’exil de Victor Hugo à Jersey, soit un an après le Coup d’Etat de Louis-Napoléon Bonaparte, cet apologue aux registres pathétique, polémique et satirique revient sur la politique douteuse de l’empereur.
Nous verrons dans cette analyse de « Souvenir de la nuit du 4 » qu’à partir du récit d’un drame intime auquel il a participé, Victor Hugo dépeint un tableau pathétique de la mort d’un enfant (I) et dresse un violent réquisitoire à l’encontre de l’Empereur Napoléon Bonaparte (II).
Questions possibles sur « Souvenir de la nuit du 4 » de Victor Hugo:
♦ Commentez la composition du poème.
♦ Que dénonce Victor Hugo dans ce poème ? Par quels moyens ?
♦ Dans quelle mesure ce poème est-il un apologue ?
♦ Quels sont les différents registres employés par Victor Hugo ?
♦ Qu’est-ce qui fait l’efficacité de ce poème ?
I – Un tableau réaliste et pathétique
A – Un récit réaliste
La première partie de « souvenir de la nuit du 4 » se présente comme le récit d’un évènement auquel a assisté Victor Hugo.
Le sujet du récit est introduit de façon directe et brutale dès le premier vers : « L’enfant avait reçu deux balles dans la tête ».
La scène est décrite avec réalisme.
Tout d’abord, une profusion de détails campent le lieu du drame : « le logis était propre, humble, paisible, honnête » , « un drap blanc dans l’armoire en noyer » , « un rameau bénit sur un portrait« . L’abondance de détail crée un effet de réel.
Victor Hugo mentionne des détails anatomiques qui soulignent la monstruosité du crime :
♦ « bouche pâle » (v. 5-6);
♦ « oeil farouche » (v.6);
♦ «Ses bras pendants » (v. 6-7);
♦ « On pouvait mettre un doigt dans les trous de ses plaies » (v.10);
♦ « son crâne était ouvert » (v. 11);
♦ « ses pauvres cheveux sont collés sur sa tempe » (v.14);
♦ « membres déjà roides »;
♦ « mains froides » (v. 21-22);
Les comparaisons permettent au lecteur de visualiser l’horreur de la scène :
« Son crâne était ouvert comme un bois qui se fend » (v. 11).
La fluidité du récit est accentuée par les rimes suivies (« tête »/ « honnête », v. 1-2 ; « portrait »/ « pleurait », v. 3-4 ; « noyer »/ « foyer », v. 19-20) et les nombreux enjambements qui créent une rupture avec le rythme poétique traditionnel :
♦ « on entendait des coups/De fusil dans la rue où l’on en tuait d’autres » (v. 16-17);
♦ « ce que la mort touche de ses mains froides/Ne se réchauffe plus aux foyers d’ici bas ! » (v. 22-23);
♦ « Est-ce qu’on va se mettre/A tuer les enfants maintenant ? » (v. 30-31);
♦ « Cela n’aurait rien fait à monsieur Bonaparte/De me tuer au lieu de tuer mon enfant ! » (v. 38-39) etc.
On relève par ailleurs les temps du récit, notamment l’imparfait, temps de la description :
« Le logis était propre, humble, paisible, honnête ;/On voyait un rameau bénit sur un portrait » (v. 2-3), « Une vieille grand-mère était là qui pleurait » (v. 7), « La nuit était lugubre ; on entendait des coups » (v. 16).
Mais ce poème narratif n’est pas uniquement réaliste : Victor use de nombreux symboles dans ses descriptions. C’est ainsi que l’enfant, au centre de la scène, est divinisé par le poète.
B – Reprise d’une topique de la peinture religieuse : la Piéta
On trouve dans « Souvenir de la nuit du 4 » de nombreuses connotations religieuses qui soulignent le caractère pieux et vertueux de la famille décrite :
♦ « un rameau bénit sur un portrait » (v. 3);
♦ « les trous de ses plaies » (v. 9);
♦ « Dieu ! » (v. 14), « mon Dieu ! » (v. 31);
♦ « comme un Jésus » (v. 35).
Le poète insiste également sur la blancheur, symbole de pureté et d’innocence : « Pâle » (v. 6), « Comme il est blanc ! » (v. 13), « un drap blanc » (v. 19).
Cette blancheur contraste avec le rouge du sang, rendant encore plus insupportable la mort de l’enfant : « plaies », « Avez-vous vu saigner la mûre » (v. 9-10).
L’enfant, comparé à Jésus (v. 35) est ainsi représenté comme un être sacré, un martyr :
« On pouvait mette un doigt dans les trous de ses plaies » (v. 9), « Son crâne était ouvert comme un bois qui se fend » (v. 11).
Victor Hugo reprend ainsi un topos de la peinture religieuse : la piéta, représentation du Christ mort allongé sur les genoux de sa mère pleurant sur le cadavre de son enfant :
« L’aïeule regarda déshabiller l’enfant […] Et quand ce fut fini, le prit sur ses genoux » (v. 12 à 15), « Elle pencha la tête et lui tira ses bas,/Et dans ses vieilles mains prit les pieds du cadavre » (v. 24-25).
Peintures représentant la piéta :
Le long discours de la grand-mère porte le pathétique de cette scène à son paroxysme.
C – Le discours de l’aïeule : sommet du pathétique
Après avoir décrit la scène, Victor Hugo donne la parole à l’aïeule.
Il transcrit sa souffrance au discours direct, ce qui marqué par la présence des tirets, l’utilisation de la première personne et l’emploi du présent et des verbes de parole :
♦ « Disant : – Comme il est blanc !approchez donc la lampe ! » (v. 13);
♦ « Puis elle dit, et tous pleuraient près de l’aïeule : – Que vais-je devenir à présent, toute seule ? » (v. 41-42).
Dans ce discours, l’aïeule exprime son désespoir, sa douleur et son indignation. On trouve ainsi de nombreuses interjections et une ponctuation expressive :
♦ « Dieu! ses pauvres cheveux sont collés sur sa tempe ! » (v. 14);
♦ « Est-ce que ce n’est pas une chose qui navre ! Cria-t-elle ; monsieur, il n’avait pas huit ans ! » (v. 26-27);
♦ « Est-ce qu’on va se mettre à tuer les enfants maintenant ? Ah !mon Dieu ! On est donc des brigands ? » (v. 30 à 32);
♦ « Dire qu’ils m’ont tué ce pauvre petit être ! » (v. 34);
♦ « Hélas! je n’avais plus de sa mère que lui. Pourquoi l’a -t-on tué ? » (v. 44-45).
Les questions oratoires (« Pourquoi l’a-t-on tué ? Je veux qu’on me l’explique » v. 45) traduisent son incompréhension et soulignent l’absurdité du crime. Les questions posées ne peuvent en effet obtenir de réponse, car comment justifier le meurtre d’un enfant ?
L’absurdité et l’injustice de la mort du jeune garçon est mise en évidence au vers 35 par la césure qui sépare le vers en deux hémistiches égaux, créant un rapport cause/conséquence absurde qui dénonce la monstruosité de l’acte :
« Il passait dans la rue, // ils ont tiré dessus » (6/6).
Le champ lexical du pathos (« pleurait », « pauvres », « navre », « pauvre petit être », « sanglots », « tous pleuraient ») et la mise en évidence du dénuement de la grand-mère vieille et illettrée (« Monsieur, quand il fallait que je fisse une lettre/C’est lui qui l’écrivait », v. 29-30 ; « Que vais-je devenir à présent, toute seule ? », v. 42) accentue encore la dimension pathétique du poème.
En outre, l’abondance de pluriel suggère la reproduction de cet acte barbare : « dans la rue où on en tuait d‘autres » (v. 17), « A tuer les enfants maintenant ? » (v. 31). L’enfant évoqué en guise d’exemple n’est qu’une victime parmi d’autres.
Transition : Derrière le discours de la grand-mère se fait entendre la voix accusatrice de Victor Hugo, transformant ce tableau pathétique en véritable réquisitoire.
II – Un violent réquisitoire
A – Références au contexte politique et implication de l’auteur
Dans « souvenir de la nuit du quatre » , Victor Hugo évoque un évènement précis de la vie politique française : la répression sanglante d’une révolte populaire suite au coup d’Etat de Napoléon Bonaparte le 2 décembre 1851.
Les références au contexte politique sont nombreuses et explicites. L’emploi du présent souligne l’actualité des faits :
« monsieur Bonaparte » (v. 38), « L’enfant n’a pas crié vive la République » (v. 46), « Il veut avoir Saint-Cloud, plein de roses l’été,/Où viendront l’adorer les préfets et les maires » (v. 56- 57).
Victor Hugo a réellement assisté et participé à cet évènement. Ainsi, il s’inclut dans le récit à travers l’emploi du « on » et de la première personne du pluriel :
« On voyait » (v. 3), « Nous le déshabillions en silence » (v. 5), « On pouvait » (v. 9), « les nôtres », « on prit » (v. 18-19), « Nous nous taisions », « on ne console pas » (v. 47-48).
La profusion de détails précis qui créent un effet de réel et confirment la présence de l’auteur apporte un poids supplémentaire au récit et au discours.
Le récit des évènements dans les deux premières strophes laisse place à une violente satire de l’Empereur dans la dernière strophe.
B – La satire de la politique de l’Empereur
Dans la dernière partie du poème, Victor Hugo raille Napoléon Bonaparte.
La portée satirique du discours est perceptible à travers l’énumération des caractéristiques de Louis-Napoléon et de son règne (v . 51 à 56) : « Il lui convient d’avoir des chevaux, des valets,/De l’argent pour son jeu, sa table, son alcôve,/Ses chasses » (v. 52 à 54), « Il veut avoir Saint-Cloud, plein de roses l’été » (v. 56)
Victor Hugo dénonce les vices de Louis-Napoléon – un homme vaniteux qui recherche l’opulence et le luxe par tous les moyens, comme le souligne l‘accumulation des pronoms possessifs et verbes liés au désir de possession (répétition de « avoir » ).
L’auteur use également l’ironie (c’est à dire qu’il écrit le contraire de ce qu’il veut signifier ) : « Monsieurs napoléon […] Est pauvre».
On retrouve cette ironie dans la phrase : « par la même occasion, il sauve/La famille, l’église et la société » (v. 54-55) – qui contredit le récit de la mort de l’enfant qui précède – mais aussi dans la dernière phrase du texte, qui constitue en quelque sorte la morale de la fable :
« C’est pour cela qu’il faut que les vieilles grands-mères,/De leurs pauvres doigts gris que fait trembler le temps,/Cousent dans le linceul des enfants de sept ans » (v. 58 à 60).
Victor Hugo feint de prendre le parti de Napoléon et de justifier ses actions (d’où l’emploi du connecteur logique qui exprime la cause « c’est pour cela que ») afin de mieux faire ressortir la monstruosité de l’Empereur qui tue des enfants par vanité et amour du luxe.
La raillerie est également accentuée par la connotation péjorative du terme « monsieur » attribué à Bonaparte : « Monsieur Napoléon, c’est son nom authentique » (v. 50). Cette appellation à la fois bourgeoise et triviale dénote le sarcasme du poète.
Enfin, la satire s’exprime aussi à travers l’évocation de l’adoration des préfets et des maires, l’idolâtrie étant considérée comme un péché par la religion : « Où viendront l’adorer les préfets et les maires » (v. 57).
C- la défense du Peuple
Dans ce poème, Victor Hugo exprime également son engagement pour la défense du Peuple.
Le choix de l’évènement narré est significatif : le poète décrit un drame intime qui touche une famille humble et apolitique.
Le discours de l’aïeule est le point central de l’argumentation du poète. La mise en évidence du dénuement de la grand-mère touche le lecteur :
« ses vieilles mains » (v. 25), « Que vais-je devenir à présent toute seule ? » (v. 42), « les vieilles grands-mères/De leurs pauvres doigts gris que fait trembler le temps » (v. 58-59).
Hugo insiste sur la vieillesse de la femme pour mieux démontrer l’injustice de la mort de l’enfant qui « n’avait pas huit ans » (v. 27), ce qui est explicité par le chiasme du vers 39 : « De me tuer au lieu de tuer mon enfant ».
Enfin, le contraste entre le « logis », « humble et honnête » (v. 2), de la grand-mère et les « palais », « chevaux » et « valets » (v. 51-52) de Louis-Napoléon est révoltant.
Le poète s’engage ici à défendre le peuple, humble, pauvre et pieux contre la politique usurpatrice et antirépublicaine de l’Empereur (« L’enfant n’a pas crié vive la République », v. 46).
Souvenir de la nuit du 4, conclusion :
Dans cet apologue aux allures de réquisitoire, Victor Hugo part du récit d’un drame intime pour critiquer la politique de Louis-Napoléon Bonaparte.
Par ce poème argumentatif aux registres réaliste, pathétique et polémique, le poète manifeste son engagement pour la défense du peuple, engagement que l’on retrouve dans son célèbre drame romantique Ruy Blas.
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Amélie, Vous êtes un super prof. Je vous suis tellement redevable. Votre précision, votre souci au détail sont tellement appréciés. En tant (Français Langue Etranger) moi-même, j’utilise vos notes maintes et maintes fois
Es ce vraiment un apologue? Car Victoire Hugo cite clairement Napoléon, cette critique n’est pas indirecte.
bonjour, je voulais savoir si vous contiez faire un commentaire sur le poème L’Expiation de Victor Hugo (il neigeait)
J’aimerais bien, mais ce ne sera peut-être pas avant ton bac.
Bonjour, les questions possibles que vous avez donné pour ce texte fonctionnent-elles toutes avec le même plan? Merci d’avance.
Toujours, mais tu dois apprendre à adapter le plan à la question posée comme je vous le montre dans mes leçons en vidéo.
Vos commentaires sont toujours aussi clairs et limpides. Merci pour votre apport inestimable pour nos enfants. Vous apportez un autre regard sur les textes.
Bonjour. Je n ai pas compris pourquoi cette fable est un appogue sachant que le l argumentation directe est présente. Merci d une réponse
Argumentation directe et indirecte sont des stratégies argumentatives qui n’ont pas de lien avec le genre du texte. Si on trouve souvent de l’argumentation indirecte dans un apologue, on peut aussi très bien y trouver de l’argumentation directe. Stratégie argumentative et genre du texte sont deux choses différentes.
Bonjour tout d’abord je tiens à vous remercier pour ce site très util! Ca me permet de mieux comprendre mes cours …. et j’ai une question .Est -que vous pouvez me dire quelle est le problemathique de ce texte svp?
Bonjour, pourriez-vous suggérer des commentaires du texte sur RONSARD, Les Amours.
– » Mignonne, allons voir si la rose.. »
Bonjour,
Est-il possible de faire comme plan I. La mort d’un enfant, II. La révolte de la grand-mère, III. La réponse du poète ?
Merci
Bonjour !
Alors tout d’abord je tiens à te remercier pour ce site qui est très fournis et qui me permet de mieux comprendre mes cours, mon professeur ayant tendance à partir un peu trop loin..
Tu as souvent dis que l’on pouvait te suggérer des textes d onc voila ci c’est possible j’aimerais beaucoup que tu puisses faire un de tes merveilleux commentaires sur certains de ces textes :
– Victor HUGO – L’incipit du « Dernier jour d’un condamné » 1829
– Victor HUGO – Les Châtiments, VII,5 1853
– Montesquieu – « Les Lettres Persanes », Lettre CVI 1721
– Montesquieu – « Les Lettres Persanes », Lettre XCIX 1721
J’ai remarqué que tu ne faisais pas beaucoup de textes sur Victor HUGO ce qui est dommage car c’est un auteur qui est souvent étudier, pour ma part tout les ans.
Bonne continuation et encore bravo pour ce site ! ^^