Comme on voit sur la branche, Sur la mort de Marie, Ronsard : commentaire

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comment on voit sur la brancheVoici une analyse du poème : « Comme on voit sur la branche… » écrit par Pierre de Ronsard en 1574 et publié en 1578 dans le recueil Sur la mort de Marie.

« Comme on voit sur la branche… », introduction :

Le sonnet « Comme on voit sur la branche » fait suite à une commande du Roi Henri III, qui vient de perdre sa maîtresse, Marie de Clèves, et souhaite lui rendre hommage par l’intermédiaire de Ronsard.

C’est l’occasion pour le poète de la Pléiade d’exprimer sa propre douleur suite à la mort prématurée d’une jeune paysanne qu’il a aimée, également prénommée Marie.

Questions possibles à l’oral de français sur « Comme on voit sur la branche… » (La mort de Marie):

♦ De quelle manière la mort de Marie est-elle évoquée ?
♦ Que peut-on dire de la composition du poème « Comme on voit sur la branche » ?
♦ Commentez les images utilisées pour représenter Marie.
♦ Quel est l’enjeu de la métaphore de la rose au centre du poème ?
♦ Montrez d’après ce texte le pouvoir transcendant ou transfigurateur de la poésie.

 Annonce du plan :

Nous verrons dans ce commentaire que l’éloge de la beauté de Marie (I) est en réalité un éloge funèbre (II). Pierre de Ronsard transfigure toutefois la mort de Marie par la poésie (III).

I – Célébration de Marie à travers la métaphore de la rose

A – La rose au coeur du poème

On remarque à la lecture de ce sonnet que la nature est omniprésente.

Un riche champ lexical de la nature et de la fleur se déploie en effet tout au long du poème : « branche », « la rose », « fleur », « ciel », « arrose » (v. 1 à 4), « feuille », « les jardins et les arbres » (v. 5-6), « feuille à feuille déclose » (v. 8), « la terre et le ciel » (v. 10), « ce panier plein de fleurs », « roses » (v. 13-14).

De plus, la nature est personnifiée, ce qui la met en valeur : « le ciel jaloux » (v. 3), « Quand l’Aube de ses pleurs » (v. 4), « Languissante elle meurt, feuille à feuille déclose » (v. 8).

Mais c’est avant tout la rose qui est au cœur de ce poème.

Elle est évoquée dès le premier vers, et mise en valeur par sa place à la rime aux vers 1 et 14 (soit le premier et le dernier vers) :
« Comme on voit sur la branche au mois de mai la rose »;
« Afin que vif et mort, ton corps ne soit que roses ».

L’homophonie entre « la rose » (v. 1) et « l’arrose » (v. 4) insiste, à travers la redondance sonore, sur l’importance de la rose.

Cette rose est caractérisée par la jeunesse et la beauté dans un éloge hyperbolique marqué par un vocabulaire mélioratif : « En sa belle jeunesse, en sa première fleur », « le ciel jaloux de sa vive couleur » (v. 2-3), « La grâce dans sa feuille », « Embaumant les jardins et les arbres d’odeur » (v. 5-6), « d’excessive ardeur » (v. 7).

B – La rose : métaphore de la beauté de Marie

Mais en réalité, c’est la beauté de la défunte Marie que célèbre Ronsard à travers la métaphore filée de la rose.

En effet, la comparaison entre Marie et la rose est implicitement soulignée par le parallélisme entre le premier quatrain et le premier tercet :
« En sa belle jeunesse, en sa première fleur/Rendre le ciel jaloux de sa vive couleur » (v. 2-3)
//
♦ « Ainsi en ta première et jeune nouveauté/Quand la terre et le ciel honoraient ta beauté » (v. 9-10).

La rose et Marie ont en commun leur jeunesse («  »belle jeunesse », première fleur » // « ta première et jeune nouveauté ») et leur beauté (« vive couleur » // « ta beauté »).

Elles suscitent toutes deux la jalousie des éléments naturels. Ainsi, la rose rend « le ciel jaloux » (v.3) tandis que « la terre et le ciel honoraient (la) beauté » de Marie (v.10).

La célébration de Marie est donc fondée sur une analogie entre la jeune femme et la rose. La comparaison est d’ailleurs mise en évidence par l’emploi d’outils comparatifs : « Comme on voit sur la branche… » (v.1); « Ainsi en ta première jeunesse… »

A la fin du poème, Ronsard dépasse la simple analogie puisque la femme se métamorphose en rose : « Afin que vif et mort, ton corps ne soit que roses » (v. 14).

II – La mort de Marie

A – L’irruption de la mort

Alors que le poème « Comme on voit sur la branche » se présentait de prime abord comme une célébration de la beauté de Marie, la mort surgit brusquement dans le deuxième quatrain, faisant de ce poème un éloge funèbre.

La mort fait irruption de manière brutale, introduite par la conjonction de coordination « Mais » au vers 7 marquant ainsi une rupture avec les vers précédents : « Mais battue, ou de pluie, ou d’excessive ardeur,/Languissante elle meurt, feuille à feuille déclose » (v. 7).

De plus, le participe passé « battue » qui connote l’agressivité, renforce l’impression de brutalité tout en soulignant l’impuissance face à la mort.

C’est d’abord la mort de la rose qui est évoquée. L’adjectif « languissante », la redondance de l’expression « feuille à feuille », les sonorités longues et le rythme lent du vers 8 (3/3/3/3) suggèrent une mort lente et douce, ou bien une certaine agonie.

La mort de la femme aimée, au contraire, surgit de manière directe, abrupte et rapide au vers 11 : « La Parque t‘as tuée, et cendres tu reposes. »

Les sonorités dures de ce vers telles que les allitérations en « r », « d », « t » et « p » martèlent l’insoutenable réalité de la mort.

On remarque toutefois que la mort n’est pas présentée que de manière brutale. Elle est également atténuée à travers le recours à l’euphémisme qui suggère davantage le sommeil que la mort : « et cendres tu reposes » (v. 11). Ces euphémismes permettent le retour au calme et à l’apaisement.

B – La douleur du poète

Ronsard évoque sa douleur suite à la mort de Marie : « Pour obsèques reçoit mes larmes et mes pleurs » (v. 12).

La nature partage le deuil du poète, comme le souligne le parallélisme entre les v.4 et 12 : « Quand l’Aube de ses pleurs au point du jour l’arrose » (v. 4) // « Pour obsèques reçoit mes larmes et mes pleurs » (v. 12).

La peine du poète qui perd un être cher transparaît dans le tutoiement et l’emploi de la première personne du singulier dans les tercets : « Ainsi, en ta première et jeune nouveauté (v. 9), « Pour obsèques reçois mes larmes et mes pleurs » (v. 12).

Le pléonasme (= termes redondants) du vers 12 (« mes larmes et mes pleurs ») et les registres lyrique et pathétique : « ses pleurs » (v. 4), « languissante » (v. 8), « Pour obsèques reçois mes larmes et mes pleurs » (v. 12) mettent en relief l’affliction de Ronsard.

Cette souffrance est également renforcée par les sonorités, comme les allitérations en « l », « r », « v » qui imitent la liquidité des larmes et les vibrations des sanglots : « on voit sur la branche », « la rose », « belle jeunesse », « première fleur », « Rendre le ciel jaloux de sa vive couleur », « l‘arrose » (v. 1 à 4), « les jardins et les arbres d‘odeur » (v. 6), « ou de pluie, ou d‘excessive ardeu», « Languissante elle meurt » (v. 7-8) etc.

La souffrance du poète est également mis en évidence par les temps verbaux. En effet, le passé composé et le présent montrent que la mort de Marie est récente et affecte toujours le poète :  « La Parque t’as tuée, et cendres tu reposes » (v. 10-11).

Transition : Le poète surmonte sa douleur en transfigurant la mort de Marie au moyen de la poésie.

III – La transfiguration de la mort de Marie à travers la poésie

A – L’idée de renaissance

Dans cet éloge funèbre, Ronsard mêle constamment la vie et la mort afin de suggérer l’idée de renaissance et de renouveau.

On trouve ainsi tout au long du poème un double champ lexical de la vie et de la mort : « vive couleur » (v. 3), « Embaumant » (v. 6), « excessive ardeur », « elle meurt », « déclose » (v. 7-8), « La Parque t’as tuée, et cendres tu reposes », « obsèques » (v. 11-12), « vif et mort » (v. 13-14).

Certains termes, comme le verbe « embaumer » (v. 6) qui connote à la fois le parfum et une pratique mortuaire, renforce cette association entre vie et mort.

Le champ lexical de la jeunesse et du printemps évoque quant à lui la vie et la renaissance : « au mois de mai », « jeunesse », « en sa première fleur » (v. 1-2), « en ta première et jeune nouveauté » (v. 9).

L‘idée de cycle est quant à elle soulignée par la circularité du poème.

On observe en effet la reprise des mêmes mots à la rime du 1er et dernier vers du poème (« rose »//« roses » v. 1/v. 14, « repose »// »reposes » v. 5/v. 11, « fleur »// « fleurs » v. 2/v. 13) et la reprise des mêmes rimes entre le premier quatrain et le second tercet (ABBA/ABBA/CCA/BBA).

L’association entre vie et mort transparaît clairement dans l’oxymore du dernier vers : « vif et mort » (v. 14) et l’idée de renouveau est accentuée par la fusion entre la femme et la fleur : « Afin que vif et mort, ton corps ne soit que roses ».

En associant ainsi la vie et la mort, le poète transcende la mort à travers la métamorphose du corps de Marie en rose. Marie renaît de ses cendres.

B – L’immortalisation de la femme aimée

En transfigurant la mort de Marie en beauté, Pierre de Ronsard vise à immortaliser la jeune femme.

Tout d’abord, la mort de Marie est représentée de façon plus esthétique que tragique. En témoigne la métaphore filée de la rose ou la référence mythologique à la Parque ( Dans la mythologie romaine, les Parques sont des fileuses qui décident de la destinée des hommes représentée par un fil qu’elles tranchent quand elles le souhaitent). La mort de Marie est ainsi sublimée.

Ensuite, la musicalité du poème lui confère une dimension incantatoire qui permet à ceux qui l’écoutent de transcender leur douleur.

Par exemple, le rythme régulier des alexandrins créé une sensation d’harmonie et d’équilibre, renforcée par les sonorités.

L’allitération en « m » et les douces assonances en « an », « on » et « ou » provoquent une sensation de bercement : « Comme on voit sur la branche au mois de mai la rose/En sa belle jeunesse, en sa première fleur/Rendre le ciel jaloux de sa vive couleur/Quand l’Aube de ses pleurs au point du jour l’arrose » (v. 1 à 4), « l’amour », « Embaumant », « Mais battue, ou de pluie, ou d’excessive ardeur », « Languissante elle meurt » (v. 5 à 8), « nouveauté » (v. 9), « Pour obsèques reçois mes larmes et mes pleurs » (v. 12).

Les répétitions et la reprise des mêmes rimes donnent un poème simple et facile à mémoriser, ce qui permet d’immortaliser Marie grâce à la poésie.

La jeune femme survit à travers les images et les sonorités de ce poème circulaire.

« Comme on voit sur la branche », conclusion :

Dans ce sonnet aux accents élégiaques, Ronsard rend hommage à la jeune et belle défunte Marie à travers notamment l’image de la rose, symbole de vie et de mort, mais aussi de vanité, qui apparaît souvent dans l’œuvre du poète (par exemple dans « Mignonne allons voir si la rose… » ou « Cueillez dès aujourd’hui les roses de la vie »).

A travers des références humanistes à la mythologie antique et à la culture païenne, le poète de la Pléiade immortalise l’image de la femme aimée grâce au pouvoir transcendantal de la poésie.

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