Je t’aime, Paul Eluard : analyse

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paul eluard je t'aimeVoici une analyse du poème « Je t’aime » de Paul Eluard.

Je t’aime, Paul Eluard, introduction :

« Je t’aime » est l’un des nombreux poèmes où Paul Eluard, poète surréaliste, célèbre l’amour et la femme.

Le Phénix, recueil publié en 1951 et dont est extrait le poème « Je t’aime », s’adresse à la dernière compagne de Paul Eluard, Dominique.

Ici, le poète célèbre cette union dans un hymne à l’amour (I) où la femme aimée est célébrée à travers la nature (II) et la renaissance du poète (III).

 Questions possibles à l’oral sur « Je t’aime » de Paul Eluard :

♦ Commentez la structure du poème « je t’aime ».
♦ Quelles images de la femme et de l’amour nous offre ce poème ?
♦ Analysez les jeux d’opposition présents dans le poème. Que peut-on en dire ?
♦ Quelles sont les influences du surréalisme dans ce poème ?

I – Un hymne à l’amour

A – Omniprésence de l’amour

L’amour est le thème principal du poème.

Ainsi la déclaration du poète à la femme aimée, qui donne au poème son titre, scande quasiment tout le texte : « Je t’aime » introduit les vers 1, 2, 6, 7, 15 et 17.

Le verbe « aimer » est même redoublé aux vers 6 et 7 : « Je t’aime pour aimer/Je t’aime pour toutes les femmes que je n’aime pas ».

De plus, les sonorités renforcent cette omniprésence de l’amour à travers l’allitération en « m » : « Je t’aime pour toutes les femmes » (v. 1), « pour les premières fleurs », « Pour les animaux purs que l’homme n’effraie pas » (v. 4-5), « Je t’aime pour aimer », « Je t’aime pour toutes les femmes que je n’aime pas » (v. 6-7), « Qui me reflète sinon toi-même je me vois si peu » (v. 8), « Il y a eu toutes ces morts », « le mur de mon miroir » (v. 11-12), « Il m‘a fallu apprendre mot par mot », « Comme on oublie » (v. 13-14), « Je t’aime pour ta sagesse qui n’est pas la mienne » (v. 15), « Pour ce cœur immortel » (v. 18), « Tu es le grand soleil qui me monte à la tête », « Quand je suis sûr de moi » (v. 20-21).

On note l’abondance de la consonne « m » géminée (deux consonnes identiques et consécutives prononcées), marquant bien l’insistance du poète pour qui cet amour représente tout.

B – Un amour heureux et complet

Pour Paul Eluard, l’amour mène au bonheur et à la plénitude.

L’exaltation du poète est soulignée par la structure anaphorique du poème doublée d’une énumération à la première et à la dernière strophe : « Je t’aime pour toutes les femmes que je n’ai pas connues/Je t’aime pour tous les temps où je n’ai pas vécu/ Pour l’odeur du grand large et l’odeur du pain chaud/Pour la neige qui fond pour les premières fleurs/Pour les animaux purs que l’homme n’effraie pas/Je t’aime pour aimer/Je t’aime pour toutes les femmes que je n’aime pas » (v. 1 à 7), « Je t’aime pour ta sagesse qui n’est pas la mienne/Pour ta santé/Je t’aime contre tout ce qui n’est qu’illusion/Pour ce cœur immortel que je ne détiens pas/Tu crois être le doute et tu n’es que raison/Tu es le grand soleil qui me monte à la tête » (v. 15 à 20).

L’anaphore et l’énumération rythment le poème qui se présente alors comme une litanie amoureuse.

La plénitude de cet amour est traduite par la répétition de l’adjectif « toutes », « tous » ou « tout » : « toutes les femmes » (v. 1 et 7), « tous les temps » (v. 2), « toutes ces morts » (v. 11), « contre tout » (v. 17).

Cette plénitude est également mise en valeur à travers le contraste marqué par les jeux d’oppositions :

Singulier/pluriel : « Je t’aime/pour toutes les femmes », « tous les temps/où je n’ai pas vécu (v. 1-2), « les animaux purs/l’homme » (v. 5).

 ♦ Affirmation/négation : « Je t’aime pour toutes les femmes/que je n’aime pas » (v. 7), « Je t’aime pour ta sagesse/qui n’est pas la mienne » (v. 15), « Pour ce cœur immortel/que je ne détiens pas », « Tu crois être le doute/et tu n’es que raison » (v. 18-19).

 ♦  Vie/mort : « Il y eu toutes ces morts » (v. 11)/ « Il m’a fallu apprendre mot par mot la vie » (v. 13).

 ♦  Pour/contre, tout/rien : « Je t’aime pour… »« Je t’aime contre tout » (v. 17), « sans toi je ne vois rien » (v. 9).

Transition : Ces contrastes renforce la singularité de la femme aimée célébrée ici par le poète.

II – Célébration de la femme à travers la nature

A – La femme associée au monde : caractéristique du surréalisme

Le rapport entre la femme et le monde est une des caractéristiques du mouvement surréaliste dont Eluard a fait partie.

Ici, la femme est associée à la nature et au monde qui entourent le poète : « Pour la neige qui fond pour les premières fleurs/Pour les animaux purs » (v. 4-5), « Sans toi je ne vois rien qu’une étendue déserte » (v. 9), « que j’ai franchies sur de la paille » (v. 11), « Tu es le grand soleil » (v. 20).

Ainsi c’est la femme, femme-soleil dont l’élément est le feu, qui éclaire le monde et réchauffe le cœur du poète.

L’association de l’eau (« grand large », v. 3) et du feu (« paille », « grand soleil ») se retrouve souvent chez les surréalistes, tout comme le thème de l’amour (par exemple chez Breton dans L’Amour fou).

La femme est également liée ici à des sensations : « Pour l’odeur du grand large et l’odeur du pain chaud » (v. 3).

B – La femme-miroir : thème récurrent de la poésie d’Eluard

Le thème de la femme-miroir apparaît constamment chez Eluard (on la retrouve par exemple dans « La terre est bleue comme une orange »).

Ici, ce thème est développé à partir de la seconde strophe à travers le champ lexical du miroir : « me reflète », « toi-même », « je me vois » (v. 8), « mon miroir » (v. 12), « illusion » (v. 17).

Le regard de la femme est fondamental pour le poète.

Il ne peut se voir et voir le monde qu’à travers les yeux de l’aimée : « Sans toi je ne vois rien qu‘une étendue déserte » (v. 9), « Je n’ai pas pu percer le mur de mon miroir » (v. 12). La forte connotation négative de « sans » et « rien » et de l‘adjectif « déserte » souligne bien l’idée que la vie du poète n’est que vide et néant sans la femme aimée. C’est grâce à son amour qu’il survit.

Enfin, l’assonance en « on » fait résonner la fusion du couple : « Pour la neige qui fond » (v. 4), « sinon » (v. 8), « comme on oublie » (v. 14), « contre tout ce qui n’est qu’illusion » (v. 17), « tu n’es que raison », « qui me monte à la tête » (v. 19-20).

Transition : C’est donc la femme qui relie le poète au monde et lui en ouvre l’accès. Grâce à elle, il renaît.

III – La renaissance du poète grâce à la femme aimée

A – Un retour à la vie

Cette renaissance du poète est d’abord introduite à la première strophe à travers l’évocation implicite et métaphorique du printemps : « Pour la neige qui fond pour les premières fleurs » (v. 3).

Grâce à la femme, le poète renaît comme les fleurs au printemps.

Par ailleurs, l’apparition brutale de la mort au centre du poème ne sert qu’à marquer le contraste avec la vie désormais retrouvée : « Il y a eu toutes ces morts que j’ai franchies sur de la paille » (v. 11), « Il m’a fallu apprendre mot par mot la vie/Comme on oublie » (v. 13-14).

Ce contraste entre vie et mort est accentué par le contraste entre passé et présent : « Entre autrefois et aujourd’hui » (v. 10), « Je t’aime » (v. 1, 2, 6, 7, 15, 17), « Qui me reflète », « je me vois », « je ne vois rien » (v. 8-9) // « Il y a eu », « que j’ai franchies », « Je n’ai pas pu », « il m’a fallu » (v. 11 à 13).

L’emploi du passé composé traduit bien le passage du passé au présent, marqué ici par l’évocation des renaissances amoureuses successives du poète, à l’image du phénix (oiseau légendaire qui peut renaître de ses cendres à l’infini) qui donne d’ailleurs son titre au recueil dont est tiré le poème.

Cette métaphore du phénix est implicitement soulignée dans le vers 11 à travers l’image de la paille : « Il y a eu toutes ces morts que j’ai franchies sur de la paille ».

Le poète revient ici sur ses amours passées aux fins malheureuses, morts symboliques dont il renaît à chaque fois, comme l’animal légendaire, grâce à un nouvel amour (« Pour ce cœur immortel que je ne détiens pas », v. 18).

B – Libération et apaisement

Cette renaissance est synonyme pour Paul eluard de libération et d’apaisement.

Chez les surréalistes, c’est l’amour (un amour fou, passionnel et fusionnel) qui permet la libération du monde et du langage à travers l’union des contraires.

Ici, nous l’avons vu, les oppositions sont nombreuses et de plus en plus rapprochées à la dernière strophe, comme pour traduire la libération progressive du poète et du poème : « pour ta sagesse », « contre tout » (v. 15 et 17), « Pour ce cœur », « Tu crois être le doute et tu n’es que raison », « Quand je suis sûr de moi » (v. 18-19 et 21).

Cette libération est également visible dans la forme et la syntaxe du poème.

En effet, le poème est composé en vers libres, sans rimes et sans ponctuation.

De plus, le rythme semble irrégulier. Chaque strophe est composée de sept vers au nombre de syllabes différent. A la première strophe, par exemple, la régularité de l’alexandrin (v. 1, 2, 4, 5) est rompue au vers 6 par un pentasyllabe.

C’est finalement à la dernière strophe que le rythme devient le plus régulier, avec une majorité d’alexandrins (v. 15, 17, 18, 19, 20).

Le poète s’affranchit des contraintes de la poésie classique en même temps qu’il retourne au calme d’un amour heureux.

Je t’aime, Paul Eluard, conclusion : 

Déclaration d’amour sous forme d’hymne adressée à sa dernière femme, « Je t’aime » est un poème biographique caractéristique de la poésie de Paul Eluard et du Surréalisme.

On y retrouve ainsi des thèmes et motifs récurrents tels que l’amour, la célébration de la femme, la nature, la femme-miroir, l’union des contraires, et la libération poétique à travers la forme et le rythme du poème.

On pourrait rapprocher « Je t’aime » du poème « Liberté », de par sa structure et ses thématiques, bien que ce dernier poème soit un poème engagé.

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Amélie Vioux

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