Les Vrilles de la vigne, Colette : analyse linéaire pour l’oral

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Voici une explication linéaire de la nouvelle « Les Vrilles de la vigne » issu du recueil de nouvelles du même titre de Gabrielle-Sidonie Colette.

Nous étudierons l’intégralité de ce récit, de « Autrefois, le rossignol ne chantait pas la nuit » à « je ne crains plus les vrilles de la vigne. »

Les Vrilles de la vigne, Colette, introduction

Les Vrilles de la vigne, publié en 1908 par Colette, regroupe vingt nouvelles d’inspiration autobiographiques.

L’auteur y a réuni des souvenirs d’enfance, des méditations sur le temps, l’amour, la solitude, et y montre à nouveau sa passion de la nature. (Voir la fiche de lecture pour le bac sur Sido suivi des Vrilles de la vigne).

Dans la première de ces nouvelles, qui donne son titre au recueil, Colette invente un conte pour expliquer pourquoi le rossignol ne chante que la nuit.

Mais c’est aussi un moyen métaphorique d’expliquer, en tant qu’artiste, son propre besoin de liberté, de solitude et d’authenticité.

Texte étudié

Autrefois, le rossignol ne chantait pas la nuit. Il avait un gentil filet de voix et s’en servait avec adresse du matin au soir, le printemps venu. Il se levait avec des camarades, dans l’aube grise et bleue, et leur éveil effarouché secouait les hannetons endormis à l’envers des feuilles de lilas.
 
 Il se couchait sur le coup de sept heures, sept heures et demie, n’importe où, souvent dans les vignes en fleur qui sentent le réséda, et ne faisait qu’un somme jusqu’au lendemain.
 
 Une nuit de printemps, le rossignol dormait debout sur un jeune sarment, le jabot en boule et la tête inclinée, comme avec un gracieux torticolis. Pendant son sommeil, les cornes de la vigne,  ces vrilles cassantes et tenaces, dont l’acidité d’oseille fraîche irrite et désaltère, les vrilles de la vigne poussèrent si drues, cette nuit là, que le rossignol s’éveilla ligoté, les pattes empêtrées de liens fourchus, les ailes impuissantes.
 
 Il crut mourir, se débattit, ne s’évada qu’au prix de mille peines, et de tout le printemps se jura de ne plus dormir, tant que les vrilles de la vigne pousseraient.
 
 Dès la nuit suivante, il chanta, pour se tenir éveillé :
 
Tant que la vigne pousse, pousse, pousse,
 
Je ne dormirai plus !                                                                               
 
Tant que la vigne pousse, pousse, pousse…
 
 Il varia son thème, l’enguirlanda de vocalises, s’éprit de sa voix, devint ce chanteur éperdu, enivré et haletant, qu’on écoute avec le désir insupportable de le voir chanter.
 
 J’ai vu chanter un rossignol sous la lune, un rossignol libre et qui ne se savait pas épié. Il s’interrompt parfois, le col penché, comme pour écouter en lui le prolongement d’une note éteinte… Puis il reprend de toute sa force, gonflé, la gorge renversée, avec un air d’amoureux désespoir. Il chante pour chanter, il chante de si belles choses qu’il ne sait plus ce qu’elles veulent dire, Mais moi, j’entends encore à travers les notes d’or, les sons de flûte grave, les trilles tremblés et cristallins, les cris purs et vigoureux, j’entends encore le premier chant naïf et effrayé du rossignol pris aux vrilles de la vigne :
 
 Tant que la vigne pousse, pousse, pousse…
 
Cassantes, tenaces, les vrilles d’une vigne amère m’avaient liée, tandis que dans mon printemps je dormais d’un somme heureux et sans défiance. Mais j’ai rompu, d’un sursaut effrayé, tous ces fils tors qui déjà tenaient à ma chair, et j’ai fui… Quand la torpeur d’une nouvelle nuit de miel a pesé sur mes paupières, j’ai craint les vrilles de la vigne et j’ai jeté tout haut une plainte qui m’a révélé ma voix…
 
Toute seule éveillée dans la nuit, je regarde à présent monter devant moi l’astre voluptueux et morose… Pour me défendre de retomber dans l’heureux sommeil, dans le printemps où fleurit la vigne crochue, j’écoute le son de ma voix… Parfois, je crie fiévreusement ce qu’on a coutume de taire, ce qui se chuchote très bas, puis ma voix languit jusqu’au murmure parce que je n’ose poursuivre…
 
 Je voudrais dire, dire, dire tout ce que je sais, tout ce que je pense, tout ce que je devine, tout ce qui m’enchante et me blesse et m’étonne; mais il y a toujours, vers l’aube de cette nuit sonore, une sage main fraîche qui se pose sur ma bouche… Et mon cri, qui s’exaltait, redescend au verbiage modéré, à la volubilité de l’enfant qui parle haut pour se rassurer et s’étourdir…
 
 Je ne connais plus le somme heureux, mais je ne crains plus les vrilles de la vigne…

« Les vrilles de la vigne », Colette


Problématique

Comment Colette se saisit-elle de la figure du rossignol, emblème traditionnel de la poésie lyrique, pour en faire un symbole d’authenticité et de liberté artistiques ?

Annonce du plan linéaire

Dans un premier temps, nous verrons qu’un récit en forme de conte révèle tout d’abord comment le rossignol est devenu nocturne, jusqu’à «de le voir chanter».

La narratrice prend ensuite la parole pour faire part de son témoignage sur le chant du rossignol, spectacle de pure passion, jusqu’à «Tant que la vigne pousse, pousse, pousse…».

Enfin, une seconde lecture du conte, métaphorique, est proposée, où la narratrice s’identifie au rossignol.

I – Le conte du rossignol : comment l’oiseau devint nocturne

De « Autrefois, le rossignol ne chantait pas la nuit » à «de le voir chanter» .

A- L’ouverture du conte : un chanteur diurne

L’atmosphère du conte est donnée par l’adverbe initial «autrefois» et les imparfaits qui suivent : «chantait», «avait», «s’en servait», «se levait», «se couchait».

On est projeté dans un passé légendaire où «le rossignol ne chantait pas la nuit».

L’emploi de l’article défini «le» montre qu’on parle non d’un rossignol parmi d’autres, mais du premier rossignol du monde.

Le conte se propose d’expliquer comment l’oiseau en est venu à ne chanter que la nuit.

La situation initiale le présente comme un bon chanteur : «il avait un gentil filet de voix».

L’expression personnifie l’oiseau, mais signale aussi que sa «voix» reste assez faiblefilet»).

L’adjectif «gentil» et l’expression «s’en servait avec adresse» montrent cependant un certain talent.

C’est un chanteur acharné, comme l’indique les deux compléments circonstanciels de temps, puisqu’il chante«du matin au soir, le printemps venu».

Comme tous les oiseaux, il est matinalil se levait avec les camarades, dans l’aube grise et bleue») – comme Colette elle-même (voir Sido).

Il mêle sa voix à celles de ses «camarades» – nouvelle personnification des oiseaux – pour un «éveil effarouché» de toute la nature.

En évoquant les «hannetons endormis à l’envers des feuilles de lilas», Colette montre son sens de l’observation et sa tendresse pour les petites bêtes qui peuplent la nature.

Le rossignol se couche avec le soleilsur le coup de sept heures, sept heures et demie»), pour une nuit très courte : «ne faisait qu’un somme jusqu’au lendemain».

B – L’élément perturbateur : le piège de la vigne

Cependant, il ne fait pas attention à l’endroit où il s’endort: «n’importe où, souvent dans les vignes en fleur qui sentent le réséda».

Or, c’est dans ces buissons odorants que se situe le piège, élément perturbateur du récit.

La posture de l’oiseau endormi sur un «jeune sarment» de vigne est décrite avec réalisme: «le jabot en boule et la tête inclinée».

Mais l’oxymore du «gracieux torticolis», délicat mais douloureux, préfigure déjà les torsades de la plante étrangleuse.

Car la vigne pousse si vite et si tortueuse qu’elle emprisonne l’oiseau.

L’image des «cornes», puis des «vrilles» et des «liens fourchus» lui donne un aspect démoniaque, sinueux, fourbe.

Elle est néanmoins dotée d’une certaine fraîcheur: le goût de ces sarments, leur «acidité d’oseille fraîche» qui «irrite et désaltère», à la fois bénéfique et mauvaise, signale l’ambivalence de cette plante.

Le piège semble inextricable: les vrilles, «cassantes et tenaces», «poussèrent si dru». On relève le champ lexical de l’entrave: «ligoté», «les pattes empêtrées», «les liens»; «les ailes impuissantes».

C – La résolution : un oiseau nocturne et libre

La libération de l’oiseau, qui suffoque («il crut mourir»), est difficile.

L’énumération de verbes au passé simple signale son action violente et précipitée pour sortir du piège : « il crut mourir, se débattit, ne s’évada qu’au prix de mille peines».

La négation restrictive «ne… que» et l’hyperbole «mille peines» soulignent ses efforts désespérés.

Une fois libre, la peur le domine encore et l’insomnie forcée lui paraît le seul moyen pour échapper au piège: «et de tout le printemps se jura de ne plus dormir, tant que les vrilles de la vigne pousseraient».

Le conte trouve alors sa résolution en révélant la raison pour laquelle le rossignol ne chante que la nuit: «il chante pour se tenir éveillé» .

Son chant le protège donc et lui conserve sa liberté.

Le chant du rossignol est illustré par trois vers, deux décasyllabes entre lesquels s’insère un vers de six syllabes, ce qui assimile le chant à la poésie, et l’oiseau au poète.

Le conte se clôt sur la musicalité de ce chant et la transformation de l’oiseau qui, de bon chanteur, devient exceptionnel par sa virtuosité et son inventivité : «il varia son thème, l’enguirlanda de vocalises». L’assonance en « a » restitue le son éclatant de ce chant.

Le rossignol prend conscience de son talents’éprit de sa voix»).

Enfin, l’oiseau se distingue par son lyrisme, sa passion comme le suggère le rythme ternaire des adjectifs : il «devint ce chanteur éperdu, enivré, haletant».

Il éveille chez l’auditeur un sentiment intense, un «désir insupportable de le voir chanter». En introduisant le thème de la vue (« le voir chanter« ) et la posture de l’auditeur, la narratrice nous fait peu à peu sortir du conte et nous amène à sa propre expérience: car elle a vu un rossignol chanter.

II – Le spectacle du chant : un modèle de pure passion

De « J’ai vu chanter un rossignol » à « Tant que la vigne pousse, pousse » .

A – Un spectacle sans spectateurs

Avec le thème de la vue, c’est aussi le «je» de la première personne, qui entre en scène: «J’ai vu chanter un rossignol sous la lune».

La narratrice témoigne du spectacle de ce chant auquel elle a assisté en cachette, car ce spectacle n’attend aucun spectateur.

Il ne s’agit plus du rossignol originel, celui du conte, désigné par l’article défini («le rossignol»), mais «d’un rossignol» parmi d’autres, héritier du rossignol légendaire.

Il est qualifié de «libre», condition que lui confèrent la nuit et la solitude: «il ne se savait pas épié».

Il ne donne ce concert que pour lui-même, sans volonté de démonstration ni orgueilcomme le souligne le pléonasme : «il chante pour chanter». C’est la preuve de la sincérité et de l’authenticité de son lyrisme.

Les attitudes physiques de l’oiseau sont rapportées («le col penché», «gonflé, la gorge renversée»), mais aussi l’aspect très personnel et intérieur du chant: «Il s’interrompt parfois […] pour écouter en lui le prolongement d’une note éteinte…».

B – Un concert virtuose

Cependant, l’ouïe reprend progressivement le pas sur la vue.

L’auditrice est attentive au rythme du chant, à son interruption, marquée par les points de suspensionune note éteinte…»), à ses reprises vigoureuses et ses crescendos: «il reprend de toute sa force».

L’attitude de l’oiseau, son «air d’amoureux désespoir» montrent son lyrisme et sa puissance, comme la répétition du verbe «chanter»il chante pour chanter, il chante de si belles choses»).

La description mêle ensuite les sensations visuelles et auditives dans une énumération passionnée qui mime la volubilité de l’oiseau:  » les notes d’or, les sons de flûte grave, les trilles tremblés et cristallins, les cris purs et vigoureux » .

L’adjectif « cristallins » suggère la virtuosité et la pureté du chant, et«les cris purs et vigoureux» son énergie.

C – Un retour au sens premier du chant

Ce rossignol fait inconsciemment écho au rossignol du conte, «éperdu, enivré, haletant».

Or, l’enivrement lyrique est tel que l’oiseau perd le sens de son chant: «il chante de si belles choses qu’il ne sait plus ce qu’elles veulent dire»: il a perdu la mémoire de cette frayeur première qui a déclenché le chant chez le rossignol originel.

La narratrice intervient alors et se démarque par l’emploi des pronoms de première personne : «Mais moi j’entends encore…, j’entends encore…».

L’anaphore « j’entends encore » permet de relier le chant de ce rossignol particulier à celui du rossignol originel, et en redonne le sens premier: «j’entends encore le premier chant naïf et effrayé du rossignol pris aux vrilles de la vignes».

Ce sont la fraîcheur et la frayeur premières de l’oiseau légendaire qui ont marqué son esprit : un chant virtuose, solitaire et donné pour soi seul, qui libère de la peur.

On en revient au vers tiré du conte: «Tant que la vigne pousse, pousse, pousse…».

III – Une métaphore pour exprimer le besoin de liberté

De « Cassantes, tenaces » à « je ne crains plus les vrilles de la vigne.« 

A – Une libération métaphorique

Subtilement, la voix de la narratrice s’assimile à celle du rossignol légendaire.

Enchaînant sur le chant de l’oiseau, le paragraphe suivant résume les étapes du conte, mais avec une première personne féminine: «Cassantes, tenaces, les vrilles d’une vigne amère m’avaient liée».

On retrouve les adjectifs « cassantes » et « tenaces » qui avaient qualifié la vigne au début du conte.

L’amertume de la plante (« vigne amère » ) fait écho à son «acidité d’oseille fraîche». Le verbe « lier » répond à l’image du rossignol prisonnier.

Mais ces éléments prennent un sens métaphorique quand on constate que le pronom «je» est devenu féminin, ce que montre l’accord du participe passé «liée».

La narratrice prend donc la place du rossignol, et le récit acquiert une dimension métaphorique.

Les étapes du conte correspondent au récit d’une trahison; mais la clé de la métaphore n’est pas encore donnée.

Le printemps et le sommeil symbolisent jeunesse et naïveté: «tandis que dans mon printemps je dormais d’un somme heureux et sans défiance». Le possessif «mon» souligne le caractère personnel de l’aventure.

L’épisode de la libération est repris en une phrase qui fait écho par son vocabulaire à la libération de l’oiseaunarrée au début du récit :

  • Le «sursaut effrayé » rappelle la peur et les efforts du rossignol pour se libérer (son «chant naïf et effrayé» )
  • «tous ces fils tors» évoquent les «vrilles», les «cornes», les «liens fourchus» de la vigne
  • La proposition relative «qui déjà tenaient à ma chair» reprend le thème de l’entrave
  • L’adverbe «déjà» souligne la surprise de la narratrice et mime la surprise de l’oiseau pris au piège.
  • Enfin, de même que le rossignol «s’évada», elle s’enfuit: «j’ai fui»
  • Comme le rossignol, elle redoute d’être à nouveau piégée: «Quand la torpeur d’une nouvelle nuit de miel a pesé sur mes paupières, j’ai craint les vrilles de la vigne».

C’est peut-être dans l’expression « nouvelle nuit de miel », derrière laquelle on entend « lune de miel » et donc l’idée d’amour et de mariage, que se trouve la clé de la métaphore.

On peut en effet penser que Colette évoque la difficulté de se libérer du conformisme son premier mari Willy, et de la contrainte liée à l’écriture de la série à succès des Claudine, imposée par Willy.

La «torpeur » désigne ici une baisse de vigilance, et peut-être la tentation d’une nouvelle union et d’une nouvelle dépendance affective.

Mais c’est par la voix et le chant, métaphore de l’écriture, que la narratrice y échappe : « et j’ai jeté tout haut une plainte qui m’a révélé ma voix ». `

Comme pour le rossignol, c’est par la peur de l’emprisonnement, dans un sursaut de frayeur, que la poétesse prend conscience de son talent.

B – Le chant libre, nocturne et solitaire

Filant la métaphore, Colette met en scène, au présent, son «chant», travail d’écriture solitaire, nocturne et libre: «Toute seule, éveillée dans la nuit».

Le lever de lune symbolise la naissance de cette indépendance: «je regarde à présent monter devant moi l’astre voluptueux et morose…». Ces deux adjectifs signalent l’ambivalence de la lune, liée à la sensualité (« voluptueux« ) mais aussi à la mélancolie (« morose« ) .

On revient une dernière fois sur la fonction salvatrice du chant – ou de l’écriture – face au piège doucereux du printemps et de l’amour : «Pour me défendre de retomber dans l’heureux sommeil, dans le printemps menteur où fleurit la vigne».

Enfin, comme le rossignol chante pour lui-même, la poétesse écrit pour elle-mêmecomme le suggère les marques de la première personne : «j’écoute le son de ma voix».

S’ensuit une description qui imite le chant passionné du rossignol, avec ses cris et ses decrescendos : «Parfois, je crie fiévreusement»; «puis ma voix languit jusqu’au murmure».

Et c’est parce que cette poésie est nocturne et solitaire que des secrets peuvent y être révélés comme le souligne le champ lexical de la confidence : «ce qu’on a coutume de taire, ce qui se chuchote très bas»; «parce que je n’ose poursuivre…».

Une intimité peut se dire dans cette «nuit sonore». Les répétitions et énumérations suivantes miment le rythme et la virtuosité de l’oiseau: «je voudrais dire, dire, dire». Les trois monosyllabes («dire») imitent les cris répétés du rossignol.

C’est ensuite une énumération avec anaphore: «tout ce que je sais, tout ce que je pense, tout ce que je devine, tout ce qui m’enchante», qui restitue des roulements de voix ou des trilles.

La polysyndète «et me blesse et m’étonne» (= répétition de la conjonction de coordination « et ») témoigne de la volonté de tout dire.

Quant au contenu de ce chant, très personnel, il relève de la poésie lyrique comme le suggère le moment (« l’aube« ) et les verbes relatifs à l’expression des sentiments (« dire », « devine », « enchante », « blesse », «  »tonne ») .

Avec l’aube, personnifiée par «la sage main fraîche », s’apaise cette passion lyrique: «et mon cri, qui s’exaltait, redescend au verbiage modéré». Le decrescendo («redescend») est restitué par le rythme de la phrase, qui devient de plus en plus ample.

Le «verbiage modéré», puis «la volubilité de l’enfant qui parle haut» montrent que l’intensité de ce chant s’atténuent.

Il en revient à sa fonction première : «se rassurer et s’étourdir» dans la nuit. L’image de l’enfant correspond à la naïveté première du rossignol.

Mais la leçon a été comprise: comme le rossignol, Colette a trouvé dans la poésie l’antidote à la crainte de l’emprisonnement, a troqué ses nuits de sommeil contre sa liberté: «Je ne connais plus le somme heureux, mais je ne crains plus les vrilles de la vigne.»

Les Vrilles de la vigne, Colette, conclusion

«Les vrilles de la vigne» se présentent donc comme un conte métaphorique.

Le conte est d’abord narré pour lui-même, puis, par un subtil changement de voix, la narratrice en propose une seconde lecture.

Elle y livre de manière masquée son besoin de solitude et d’indépendance, convaincue que c’est dans cette solitude nocturne, dans une poésie libre et authentique, que se révèle son vrai talent.

Colette a écrit ce conte après s’être séparée de son mari Willy: elle cherchait dès lors à affirmer son indépendance en tant qu’artiste.

Enfin, on lit dans cette œuvre l’amour de Colette pour le monde sauvage et l’attention qu’elle lui porte.

Cela apparaît dans les détails donnés sur les senteurs de la vigne, le goût des sarments, les postures du rossignol, et dans sa manière d’en décrire le chant. Au-delà de l’aspect symbolique du conte, on admire la connaissance profonde qu’a Colette de la nature.

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Amélie Vioux

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