Courage, Paul Eluard : analyse

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courage eluardVoici un commentaire du poème « Courage » de Paul Eluard.

Courage, Paul Eluard : introduction

Paul Eluard, poète engagé, Résistant, publie clandestinement « Courage » en 1943, sous l’Occupation allemande.

Dans ce poème aux allures de discours patriotique, il encourage le peuple français à garder espoir.

Ainsi, après avoir décrit le malheur de la situation présente (I), Paul Eluard fait l’éloge de Paris (II) et adresse au peuple un message d’espoir et un appel à la révolte et à la résistance (III).

 Questions possibles sur « Courage » d’Eluard :

Quelle vision de Paris et des Parisiens nous offre le poète ?
Analysez les effets de contraste et les oppositions présents dans le texte.
Montrez que ce poème est un message d’espoir adressé au peuple français.
En quoi peut-on dire que « Courage » est un poème engagé ?
♦ Quels sont les buts de ce poème ?

I – Le constat par le poète du malheur de la situation présente

A – Insistance sur la misère et le dénuement

Dans la première partie du poème « Courage », le poète constate la misère subie par les français.

Ce dénuement est souligné à travers un riche champ lexical de la misère et de la pauvreté : « froid », « faim », « ne mange plus », « dans la rue », « vieux vêtements de vieille », « dort tout debout sans air » (v. 1 à 4), « pauvres » (v. 5), « travailleurs affamés » (v. 10), « nudité », « pâleur », « maigreur » (v. 13-14).

Le poète insiste également sur le malheur et la souffrance dont le peuple est victime : « Plus de malheur encore est imposé aux pauvres » (v. 5), « De Paris malheureux » (v. 7).

Cette souffrance est accentuée par la tournure hyperbolique du vers 5 (« Plus de malheur encore ») et le participe passé « est imposé » qui souligne l’impuissance du peuple forcé de subir cette misère.

Enfin, l’emploi du présent d’énonciation indique que la situation constatée est actuelle : « Paris a froid Paris a faim », « Paris ne mange plus », « Paris dort tout debout » (v. 1 à 4).

B – Inégalités et injustice

Le poète évoque également l’inégalité et l’injustice de la situation présente : « Tu ne supportes pas l’injustice », « Pour toi c’est le seul désordre » (v. 19-20).

Ces inégalités transparaissent à travers le rythme irrégulier et la syntaxe du poème.

En effet, les vers ont tous des longueurs différentes :
Octosyllabes (vers 1, 6, 10, 11, 13-14, 20-21, etc.);
♦ Alexandrins (v. 2, 3, 4, 5, 15, 17, 31);
Vers hexasyllabiques (v. 7, 8, 16, 18, 23, 25).
Tétrasyllabes (v. 37, 39) et d’autres longueurs de vers.

L’inégalité du rythme et le désordre apparent qui en ressort renvoient à l’inégalité entre les Parisiens et les soldats nazis et soulignent l’injustice de la situation.

Transition : Si le poète pointe les inégalités et l’injustice à Paris sous l’occupation allemande, il n’en fait pas moins un éloge de la ville et de son peuple.

II – L’éloge de la ville de Paris

A – La personnification de la ville

Tout au long du poème « Courage », Paris est mis en valeur de différentes manières.

D’abord, à travers la personnification : « Tu es vivant d’une vie sans égale » (v. 12), « Tout ce qui est humain se révèle en tes yeux » (v. 15).

Ainsi le poète prête à la ville des caractéristiques humaines comme celles de porter de vêtements ou de dormir : « Paris a mis de vieux vêtements de vieille », « Paris dort tout debout » (v. 3-4), « Paris malheureux » (v. 7), « Ingénue et savante » (v. 18).

C’est que Paris désigne, par métonymie, l’ensemble des Parisiens et plus généralement le peuple français : « C’est la beauté c’est la bonté de ses travailleurs affamés » (v. 10).

Enfin, cette personnification de Paris est renforcée par les comparaisons : « Fine comme une aiguille forte comme une épée » (v. 17), « Paris tremblant comme une étoile » (v. 22).

La ville est ainsi réanimée à travers la parole poétique.

D’ailleurs, les allitérations en « f », en « v », en « d » et en « p » traduisent bien l’atmosphère qui règne sur Paris. On croit en effet entendre le souffle du vent glacé et le martèlement de la guerre : « Paris a froid Paris a faim » (v. 1), « Paris a mis de vieux vêtements de vieille », « Paris dort tout debout sans air dans le métro » (v. 3-4), « Plus de malheur encore est imposé aux pauvres » (v. 5), « C’est l’air pur c’est le feu » (v. 8), « Ne crie pas au secours Paris », « Tu es vivant d‘une vie sans égale » (v. 11-12).

B – Un éloge contrasté

Si le poète décrit Paris à travers des adjectifs mélioratifs : « C’est la beauté c’est la bonté » (v. 9), « ma belle ville » (v. 16), cet éloge est cependant contrasté.

En effet, de nombreuses antithèses sont employées pour décrire Paris :

♦ « froid » (v. 1)// « c’est le feu » (v. 8)
« sans air » (v. 4) // « C’est l’air pur » (v. 8)
« Et la sagesse et la folie » (v. 6),
« Fine comme une aiguille forte comme une épée »,
« Ingénue et savante »
(v. 17-18).

Mais ces associations presque oxymoriques ne dévalorisent pas Paris, bien au contraire. Le poète veut montrer à travers le contraste que la ville reste belle et forte malgré la misère qu’elle subit et qui l’affaiblit.

Cela se traduit par l’antithèse entre le champ lexical de la fragilité et celui de la force : « froid », « faim », « ne mange plus », « vieux vêtements de vieille », « sans air » (v. 1 à 4), « pauvres » (v. 5), « travailleurs affamés » (v. 10), « nudité », « pâleur », « maigreur » (v. 13-14) // « vivant d’une vie sans égale » (v. 12), « forte comme une épée » (v. 17), « survivant » (v. 23).

Enfin, cette force est mise en valeur aussi à travers le contraste avec la « force idiote » des « ennemis » (v. 35-36).

En effet, en dévalorisant les allemands au moyen de périphrases péjoratives, le poète valorise encore plus sa patrie : « La force idiote a le dessous », « Ces esclaves nos ennemis », « S’ils sont capables de comprendre » (v. 38). Ici, le poète renverse la situation en comparant ceux qui occupent la ville à des esclaves.

Cette position de force est également marquée par la structure anaphorique du poème qui place Paris en début ou en fin de vers dans la majeure partie du poème. Le nom de Paris est ainsi mis en valeur, tandis que les allemands ne sont évoqués qu’à la fin du poème et indirectement.

Transition : Eluard redonne ainsi le pouvoir au peuple français, mais aussi et surtout courage et espoir.

III – L’appel du poète : entre espoir et révolte

A – Adresse directe aux Parisiens et solidarité du poète

Dès le vers 11, le poète s’adresse directement à Paris. Il interpelle son peuple et l’exhorte au courage : « Ne crie pas au secours Paris/Tu es vivant d’une vie sans égale » (v. 11-12).

L’impératif et le tutoiement témoignent de l’implication du poète, proche et solidaire de sa patrie : « Paris ma belle ville » (v. 16), « Tu ne supportes pas l’injustice » (v. 19).

A partir du vers 23, le passage à la première personne du pluriel renforce cette solidarité : « Notre espoir », « Nous qui ne sommes pas casqués » (v. 26), « Notre lumière nous revient », « Les meilleurs d’entre nous sont morts pour nous » (v. 29-30).

La répétition du « nous » accentue l’implication du poète, victime lui aussi de l’Occupation.

Eluard s’inclut dans le peuple français et met en avant sa fraternité : « Frères, ayons du courage » (v. 25).

Au contraire, lorsqu’il s’adresse à l’ennemi, c’est indirectement et à la troisième personne, avec le plus de distance possible : « Ces esclaves nos ennemis/S’ils ont compris […] Vont se lever » (v. 36 à 39).

Le démonstratif « ces » s’oppose au possessif « nos ». La solidarité accentue la force du peuple français.

B – Un message d’espoir

Cet appel aux Parisiens est avant tout un message d’espoir.

Le présent d’énonciation : « Tu es vivant » (v. 12) et le présent à valeur de futur proche : « Tu vas te libérer » (v. 21 et 24) traduisent l’espoir et l’optimisme que le poète cherche à transmettre au peuple.

Cet espoir est marqué par un champ lexical de la lumière : « étoile » (v. 22), « rayon », « s’allume », « lumière » (v. 28-29).

On trouve aussi un champ lexical de la vie et du renouveau : « vivant », « vie » (v. 12), « survivant » (v. 23), « veines » (v. 28), « morts » (v. 30), « sang », « cœur » (v. 31), « de nouveau le matin » (v. 32), « printemps naissant » (v. 34).

Le poète encourage les français en évoquant sa délivrance, sa libération prochaine : « Tu vas te libérer » (v. 21, 24), « La pointe de la délivrance » (v. 33).

Cette délivrance, perçue comme une renaissance, est représentée par les images du printemps et du matin : « Et c’est de nouveau le matin un matin de Paris » (v. 32), « L’espace du printemps naissant » (v. 34).

D’ailleurs, la progression même du poème qui commence par l’hiver (« Paris a froid », v. 1) et se termine sur le printemps traduit bien cet espoir de retour symbolique à la lumière et la vie.

C – Un appel à la Résistance

Derrière ce message d’espoir se cache un appel à la Résistance.

Poète engagé et Résistant, Eluard encourage et exhorte les français à garder espoir mais aussi à se battre et à résister.

Ce poème est avant tout un discours patriotique, oratoire, ce qui marqué notamment par la structure anaphorique qui scande le texte et lui donne un ton incantatoire : « Paris a froid », « Paris ne mange plus », « Paris a mis », « Paris dort » (v. 1 à 4), « Paris ma belle ville » (v. 16), « Tu vas te libérer Paris/Paris tremblant comme une étoile » (v. 21-22).

Le poète cherche à convaincre et à persuader ses compatriotes à se révolter contre l’Occupation, la servitude, et surtout pour la liberté : « Tu vas te libérer Paris » (v. 21). Cette liberté transparaît d’abord à travers la poésie, une poésie en vers libres, sans rimes et sans ponctuation.

Courage, Paul Eluard : conclusion

Dans « Courage », le poète part du constat d’un Paris victime de la misère, malheureux et affamé pour mieux mettre en avant sa force et sa vitalité à travers un éloge de la ville et de sa patrie.

A la fois message d’espoir et poème engagé destiné à encourager le peuple français, « Courage » est aussi une incitation à la révolte, un appel à résister, à se battre pour la liberté, valeur fondamentale pour Eluard. On peut d’ailleurs rapprocher ce poème de « Liberté » écrit la même année.

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Liberté, Paul Eluard : analyse (poème engagé)
La courbe de tes yeux, Eluard : analyse
Je t’aime, Paul Eluard : commentaire
La terre est bleue comme une orange, Eluard : commentaire
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La colombe poignardée et le jet d’eau, Apollinaire : analyse
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Amélie Vioux

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17 commentaires

  • Bonjour,
    Peut-on dire que les vers « Plus de malheur encore est imposé aux pauvres » (V5) et « De Paris malheureux » (V7) constituent une antanaclase bien que séparés par un autre vers ?
    merci de votre réponse.

  • 1)Qui est désigné par la «force idiote»? Pourquoi le poète utilise-t-il cette figure de style?

    2) Que cannotent les expressions «un matin» et «espace de printemps»?

  • Salut! J’adore cette type d’analyse du texte français. J’étudie poésie française et je pense merveilleuse la possibilité d’être capable de comprendre la profondeur dans l’analyse.Merci bien!

  • Franchement , pourquoi n’intégrez-vous pas l’éducation nationale ? j’avoue que tombée au hasard sur votre site, il me semble exploiter une  » culture  » du résultat , contraire à l’esprit dans lequel s’enseigne la littérature , vous donnez des « astuces  » des plats préparés , mais rien de vivant rien qui ne soit capable de donner aux élèves désemparés la capacité à réagir personnellement sur un texte , or, l’évolution de la discipline insiste sur cet objectif .
    Chacun sait qu’il est aisé de mettre un cours en ligne , plutôt que de se trouver devant une classe de 35 , qu’un cours a pour fondement une dialectique , qu’une interprétation ne doit pas être imposée, encore moins un plan , il est bien sûr évident que les élèves seront ravis , mais que se passera-t-il si un examinateur creuse un peu le  » tout fait » , en posant une simple question : et vous ? que pensez-vous de ce texte ?

    Votre site ressemble curieusement à cette mode de  » prenez confiance en vous  » comment réussir sa vie » etc… et applique les lois du marketing .

    • Bonjour Iseut,
      Si quelques élèves apprennent par cœur des analyses sans les comprendre, c’est loin d’être le cas de la majorité qui confronte mes analyses avec les notes prises en classe pour élaborer leurs fiches. Beaucoup d’élèves travaillent sérieusement et avec intelligence. Je trouve curieux que vous souhaitiez avoir le monopole de la diffusion du savoir. Mon site ne remet d’ailleurs pas en cause le travail des professeurs. C’est un outil supplémentaire pour les élèves.

  • Fiche détaillée, mais combien y a t-il de strophes ? de vers ? de rimes ? merci de me répondre afin d’aider d’autres personnes dans mon cas qui doivent faire un DM sur cette poésie avec des questions farfelues.

    • Attends-tu de trouver sur internet les réponses exactes au questionnaire de ton professeur ? Il serait temps d’utiliser un peu ta matière grise et de faire tes devoirs.

  • merci beaucoup c’est vraiment très détailler mais je pense même un peu trop il y a l’essentiels serte mais il faudrait je pense allez droit au but !!! mais sinon y’a rien a dire

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