Jean-Jacques Rousseau

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jean jacques rousseauCette fiche auteur est rédigée par Romain Treffel, du site 1000 idées de culture générale

Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) est un des écrivains les plus célèbres du siècle des Lumières.

Auteur de traités, de romans, de pièces de théâtre, de lettres, il était pourtant, à la différence de beaucoup de philosophes des Lumières, un autodidacte total. Comme il était alors très difficile de vivre de sa plume, il a travaillé toute sa vie pour conserver son indépendance économique.

Jean-Jacques Rousseau occupe une place particulière dans le mouvement des Lumières, car il en est à la fois un représentant et un critique.

Au-delà des idées, il a marqué la littérature française par l’éloquence de son style, qui transparaît notamment dans ses Confessions.

Biographie de Rousseau

Jean-Jacques Rousseau naît en 1712 à Genève, dans une famille protestante, d’une mère fille d’horloger – elle meurt en couches neuf jours plus tard – et d’un père horloger voyageur, passionné par la lecture. Élevé par son père, il lit précocement les grands classiques, notamment La Bible et les Vies parallèles de Plutarque.

À 10 ans, il est mis en pension chez un pasteur où il découvre le châtiment corporel (une fessée) ; puis il est confié à son oncle. Ce dernier le place en apprentissage chez un maître graveur dont la discipline sévère rebute le jeune Rousseau.

À 16 ans, une situation décide de son destin : sorti de Genève pour festoyer, il trouve les portes fermées à son retour. Il choisit alors de fuir la ville à pied plutôt que de rentrer trop tard et de se faire battre.

Il arrive à Annecy. Il y rencontre un vicaire catholique qui lui indique une veuve de Savoie, Françoise-Louise de Warens, laquelle prend sous son aile les candidats à la conversion au catholicisme. Il est sous le charme de cette grande dame, qui deviendra sa maîtresse des années plus tard.

Mme de Warens envoie J.J. Rousseau à Turin pour préparer sa conversion. Il y vivote avec en prenant quelques emplois subalternes, et il revient auprès de sa tutrice en 1729. Constatant son goût pour la musique, elle l’invite à apprendre auprès d’un maître de chapelle. Rousseau abandonne toutefois son professeur lors d’un voyage à Lyon, puis il erre dans les environs pendant un certain temps.

Il revient auprès de Mme de Warens en 1731. Il passe plusieurs années à lire abondamment – il emprunte les ouvrages – et à flâner dans la nature. Il prend un emploi administratif et il donne des cours de musique aux jeunes filles de la bonne société de Chambéry.

Il se rapproche des intellectuels des Lumières en devenant précepteur à Lyon en 1740. Il y gagne l’estime de la bonne société, mais ses cours se passent mal. Il décide alors de tenter sa chance à Paris.

Il arrive dans la capitale avec le projet de se faire connaître grâce à un système alternatif de notation musicale – en vain. Il fréquente les salons et devient l’ami de Diderot, qui lui confiera la rédaction d’articles sur la musique pour l’Encyclopédie.

Il passe un an (1743-1744) à Venise en tant que secrétaire de l’ambassadeur français, puis il revient à Paris. En 1745, il s’installe avec une jeune lingère, dont il aura 5 enfants, tous placés aux Enfants-Trouvés.

Il accède à la célébrité avec son Discours sur les sciences et les arts (publié en 1751), écrit dans le cadre du concours de l’Académie de Dijon. Il confirme en 1754 avec son Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes, composé pour un autre concours de la même académie. Sa remise en cause du progrès et son éloge de la nature lui confèrent une place à part dans le courant des Lumières.

Écrivain célèbre et controversé, il devient misanthrope. Il erre au gré des invitations.

Il écrit successivement un long roman, Julie ou la Nouvelle Héloïse (1761), qui connaît un grand succès ; un essai de pédagogie, Émile ou De l’éducation (1762) ; et un traité qui deviendra un classique de la philosophie politique, Du contrat social (1762).

Attaqué par certains représentants des Lumières (notamment Voltaire et D’Alembert), il tombe finalement dans la paranoïa.

Il meurt en 1778 au château d’Ermenonville, près de Paris, et il devient l’objet d’un culte.

Ses Confessions seront publiées de manière posthume (la première partie en 1782, la seconde en 1789), mais il en avait déjà lu des extraits dans les salons.

Les œuvres majeures de Rousseau

Discours sur les sciences et les arts (1751)

Ce discours constitue une sorte de provocation à l’encontre des Lumières : sa thèse heurte, elle fait scandale.

En effet, à la question de savoir « Si le rétablissement des sciences et des arts a contribué à épurer les mœurs », Rousseau répond que la Renaissance (XIIIème-XVème siècles) a en réalité réduit le niveau de la moralité. Ce faisant, il prend à revers la thèse attendue – celles des Lumières – selon laquelle le progrès de la moralité accompagne le progrès des sciences et des arts.

Dans la première partie du discours, il souligne tout d’abord la fonction de divertissement des sciences et des arts, à cause desquels les hommes oublient leur état de servitude. Il illustre ensuite la corruption morale engendrée par le progrès en opposant la pureté de mœurs de Sparte à l’amollissement du caractère dans l’Athènes civilisée.

Il considère que les dégâts causés par l’avancée des sciences et des arts sont irréversibles. La culture les répare, mais seulement en partie.

Dans la seconde partie du discours, Rousseau présente la curiosité et l’orgueil comme les racines des sciences. Quant aux arts, il les condamne en les associant au luxe qui se substitue progressivement à la simplicité de l’homme naturel.

Il compare la faiblesse des êtres raffinés à la vigueur des individus animés par les vertus militaires. Seuls les grands hommes, la minorité de sages, peuvent tirer quelque chose de positif des sciences et des arts pour rendre service à l’humanité.

Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes (1754)

La question de cet autre concours de l’Académie de Dijon était « Quelle est l’origine de l’inégalité parmi les hommes, et si elle est autorisée par la loi naturelle ? ».

Dans la première partie du discours, Rousseau étudie l’homme à l’état de nature. En effet, il s’agit d’un état fondamental d’égalité dont il faut partir pour comprendre l’inégalité sociale.

Dans cet état d’égalité naturelle, la vie humaine est quasi animale. Elle est brève, pacifique (contrairement à la vie en société), et heureuse. L’homme n’est pas sociable ; il est une sorte de chasseur-cueilleur indépendant et solitaire.

L’homme ne connaît pas l’amour propre, seulement l’amour de soi, c’est-à-dire l’auto conservation inscrite dans la nature humaine. C’est le sentiment de la pitié qui le retient de s’approprier par la violence les ressources des plus faibles.

Dans la seconde partie du discours, Rousseau explique le passage de l’état de nature à l’état social.

Des catastrophes naturelles concentrent les hommes en de mêmes endroits : c’est la naissance de la société.

Ensuite, l’invention de l’agriculture et de la métallurgie implique la mise en place de la propriété privée, le concept juridique à l’origine de l’inégalité entre les hommes : « Le premier qui, écrit-il, ayant enclos un terrain, s’avisa de dire : Ceci est à moi, et trouva des gens assez simples pour le croire, fut le vrai fondateur de la société civile ».

Cette nouvelle situation a entraîné l’émergence des passions sociales qui corrompent le cœur de l’homme. L’individu est désormais animé par l’amour de soi : il ne cesse de se comparer à ses semblables.

Émile ou De l’éducation (1762)

Émile ou De l’éducation est un traité d’éducation. Il s’agit d’un thème auquel Rousseau pense depuis longtemps, étant donné son expérience de précepteur.

Le philosophe imagine un jeune homme de bonne famille et en bonne santé dont il doit s’occuper depuis le berceau jusqu’au mariage. Le traité est divisé en 5 livres, chacun consacré à une période de l’éducation d’Émile.

Dans les deux premières années (livre I), l’objectif de Rousseau est de préserver en son élève la bonté originelle de la nature. Il le soustrait donc à toute influence sociale.

De 2 à 12 ans (livre II), le petit enfant devient un garçon. Le maître favorise alors l’apprentissage du langage articulé et la maîtrise du corps dans l’espace. Il doit rester relativement en retrait afin que l’élève découvre et apprenne par lui-même. À ce stade, il est prématuré de chercher à cultiver l’intelligence.

De 12 à 15 ans (livre III), Émile peut commencer à acquérir des connaissances utiles. Il s’initie par la pratique aux sciences naturelles, à la physique, ou encore à la géographie. L’histoire, les langues, et plus généralement les livres ne sont pas encore nécessaires. Il travaille à sa future indépendance économique en apprenant le métier de menuisier.

De 15 à 20 ans (livre IV), Émile prépare son entrée dans la société. Le maître façonne sa sensibilité et l’initie aux questions religieuses.

Dans le livre V, Rousseau décrit la femme parfaite par l’intermédiaire du personnage de Sophie, l’épouse d’Émile.

Du contrat social (1762)

Rousseau s’interroge sur la légitimité du pouvoir politique à une époque historique où il est admis que le citoyen doit obéir à son prince, en vertu de Dieu, comme un fils à son père.

Jean-Jacques Rousseau part du principe qu’aucun individu n’a autorité par nature sur un autre. Par conséquent, l’autorité politique doit émaner du libre consentement des sujets. Ceux-ci se lient par un contrat : ils abdiquent leurs biens et leurs droits individuels afin de donner à la communauté le pouvoir de viser l’intérêt général.

La souveraineté populaire née de ce contrat social ne peut pas être confiée à des représentants ; elle ne peut pas être divisée ; elle ne peut pas se tromper, et elle n’admet pas la contestation (d’une minorité, par exemple).

En pratique, un législateur est nécessaire pour convertir la volonté générale en règles. Il s’agit d’un homme supérieur, solitaire et désintéressé, qui propose des lois au peuple.

Le gouvernement qui traduit la volonté populaire en actes peut être soit une démocratie (gouvernement du grand nombre), soit une monarchie (gouvernement d’un seul), soit une aristocratie (gouvernement d’un petit nombre, étymologiquement « les meilleurs »). Ce sont les circonstances historiques qui déterminent la meilleure forme. Le peuple doit se méfier du gouvernement, qui est par nature susceptible d’accaparer le pouvoir.

Au dieux des cités antiques comme au christianisme, Rousseau préfère une « religion civile » qui inspire à l’individu la valeur sacrée de son appartenance au Tout social.

Les thèmes de prédilection de Rousseau

Rousseau traite principalement de 4 thèmes : la bonté de la nature ; la corruption de l’homme par la société ; la politique ; la religion.

La bonté de la nature

Adepte des longues marches dans des environnements naturels sauvages, Rousseau affirme et célèbre la bonté fondamentale de la nature.

Il donne une vision idéalisée de l’homme à l’état de nature : celui-ci est pur de tout vice, incapable de faire le mal. Totalement libre dans sa solitude, il ne connaît pas l’inégalité ni l’angoisse – il ne pense pas au lendemain, seul compte l’instant présent.

L’homme est cependant « perfectible », ce qui signifie que la nature humaine change, qu’elle évolue au cours de l’histoire en fonction des conditions de vie.

La corruption de l’homme par la société

En vertu de cette propriété – la « perfectibilité » – la nature humaine se dégrade lors du passage de l’état de la nature à la société.

Autrefois indépendant, l’homme est désormais suspendu à l’opinion de ses semblables. Obsédé par la hiérarchie sociale, il agit maintenant dans le but de gagner l’estime d’autrui. Il abandonne la simplicité naturelle, il oublie l’essentiel et se préoccupe de tous les artifices qui naissent dans la vie sociale.

Associés au progrès par les penseurs des Lumières, les sciences et les arts ne sont pourtant, chez la plupart, qu’une autre émanation de l’amour de soi qui ronge le cœur de l’homme.

La politique

S’il est impossible de revenir en arrière jusqu’à l’état de nature, il est toutefois souhaitable, selon Rousseau, de minimiser la corruption sociale. Pour ce faire, il faut organiser la vie collective de manière à rendre l’autorité légitime.

Pour Rousseau, la première finalité de la politique est d’instaurer l’égalité parmi les hommes. Ils seront tout d’abord égaux en droit, en tant que citoyens investis du même pouvoir politique ; ils seront ensuite égaux en fait, puisque leurs possessions seront aliénées à la communauté, dont les règles empêcheront désormais tout enrichissement excessif.

La seconde finalité de la politique est d’instaurer la liberté. En mettant fin à l’inégalité, la société du contrat social garantira la liberté morale du citoyen, au sens où il n’aura plus à dépendre d’un autre homme. Elle lui offrira de surcroît une liberté politique, qui se concrétisera dans sa participation à la souveraineté.

La religion

Né protestant, Rousseau s’est converti plusieurs fois dans sa vie.

Il défend par certains aspects une vision traditionnelle de la religion. Par exemple, il n’est pas matérialiste et il adhère à la thèse judéo-chrétienne selon laquelle Dieu est omniscient.

Sa foi est cependant plutôt originale. Ainsi, il refuse le péché originel et la prédestination, qui sont pourtant des idées-forces du protestantisme. Son récit de l’état de nature constitue aussi implicitement un refus de l’anthropologie de la Genèse.

Dans la Profession de foi du vicaire savoyard, il fonde la religion sur le sentiment du cœur – plutôt que sur le dogme, ou à l’inverse sur la seule raison.

On peut dire que Rousseau est un déiste rationaliste : il croit rationnellement en l’existence d’une divinité, sans toutefois accepter aucune religion établie.

À quel mouvement littéraire appartient Rousseau ?

Rousseau est généralement présenté comme un écrivain des Lumières, le courant culturel opposé à l’oppression religieuse et politique qui s’est diffusé dans toute l’Europe au XVIIIème siècle.

Il était effectivement contemporain du mouvement et il en a fréquenté les plus illustres représentants (Voltaire, Diderot, D’Alembert, Condillac, etc.).

On peut considérer qu’il appartient bien aux Lumières sur le plan des idées.

De fait, il a critiqué l’oppression religieuse en refusant le dogme et l’autorité spirituelle de l’Église, auxquels il préfère l’introspection et le sentiment.

Il a aussi contribué à dénoncer l’oppression politique en affirmant que les règles de la société ont été élaborées par les riches, les plus grands propriétaires, dans le but de préserver l’inégalité en leur faveur.

Rousseau sort cependant du cadre idéologique des Lumières par plusieurs aspects.

Il ne croit pas que le progrès rende l’homme meilleur, et il préfère la simplicité de la nature à tous les raffinements de la culture.

Plus fondamentalement, il met en évidence les limites de la raison déifiée par le courant, comme la tendance de l’homme, aussi rationnel soit-il, à sous-estimer la force de ses préjugés.

Les écrivains influencés par Rousseau

L’œuvre de Rousseau a eu une vaste influence.

D’une part, elle a inspiré à beaucoup d’écrivains l’idée de la supériorité morale de la nature sur la culture.

On peut dès lors la voir comme une des racines du mouvement romantique qui se développera dans la première moitié du XIXème siècle en réaction au rationalisme des Lumières.

L’oeuvre de Rousseau est également une des sources du rapport à la nature du grand écrivain russe Tolstoï, qui valorisait le travail manuel et admirait la sérénité naturelle des paysans.

D’autre part, elle a eu une forte influence politique.

Ainsi, les protagonistes de la Révolution française ont directement puisé chez Rousseau pour imaginer un système et une nouvelle société purgés de l’inégalité caractéristique de l’Ancien Régime.

Le Discours sur l’inégalité et le Contrat social ont plus généralement inspiré les écrivains socialistes et marxistes, en particulier les utopistes français du XIXème siècle comme Saint-Simon et Charles Fourier.

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« De l’esclavage des nègres », Montesquieu : analyse
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Supplément au voyage de Bougainville, Diderot, l’aumônier
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Jacques le fataliste, Diderot, incipit
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