La Princesse de Clèves, excipit (fin du roman) : analyse linéaire

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la princesse de clèves excipit analyseVoici une explication linéaire de l’excipit de La Princesse de Clèves de Madame de La Fayette (dernière page du roman).

L’extrait étudié correspond à la fin du roman, de « M. de Nemours pensa expirer de douleur » jusqu’à « laissa des exemples de vertu inimitables » .

La Princesse de Clèves, excipit, introduction

Madame de la Fayette publie anonymement La Princesse de Clèves en 1678.

Ce roman qui se déroule à la cour d’Henri II où triomphent « la magnificence et la galanterie » interroge la possibilité de l’amour et sa compatibilité avec la morale et la vertu.

Ce récit narre la destinée d’une princesse exceptionnelle au sein de la Cour : après avoir épousé le Prince de Clèves, la princesse de Clèves éprouve une passion amoureuse pour un autre que son mari, le duc de Nemours.

Ce roman d’analyse psychologique évoque alors avec un raffinement inédit la lutte de la princesse pour ne pas céder à la passion.

(Voir mon analyse de La Princesse de Clèves – fiche de lecture essentielle pour le bac de français)

Le prince de Clèves, qui apprend cet amour secret, en meurt de chagrin.

Bouleversée par ce décès dont elle se sent responsable, la princesse de Clèves renonce à la cour et à l’amour du duc de Nemours, au profit d’une retraite religieuse où elle meurt.

L’extrait étudié ici en lecture linéaire clôt donc le roman par la mort de l’héroïne.

Texte étudié

M. de Nemours pensa expirer de douleur en présence de celle qui lui parlait. Il la pria vingt fois de retourner à madame de Clèves, afin de faire en sorte qu’il la vît ; mais cette personne lui dit que madame de Clèves lui avait non seulement défendu de lui aller redire aucune chose de sa part, mais même de lui rendre compte de leur conversation. Il fallut enfin que ce prince repartît, aussi accablé de douleur que le pouvait être un homme qui perdait toutes sortes d’espérances de revoir jamais une personne qu’il aimait d’une passion la plus violente, la plus naturelle et la mieux fondée qui ait jamais été. Néanmoins il ne se rebuta point encore, et il fit tout ce qu’il put imaginer de capable de la faire changer de dessein. Enfin, des années entières s’étant passées, le temps et l’absence ralentirent sa douleur et éteignirent sa passion. Madame de Clèves vécut d’une sorte qui ne laissa pas d’apparence qu’elle pût jamais revenir. Elle passait une partie de l’année dans cette maison religieuse, et l’autre chez elle ; mais dans une retraite et dans des occupations plus saintes que celles des couvents les plus austères ; et sa vie, qui fut assez courte, laissa des exemples de vertu inimitables.

Problématique

En quoi cet excipit affirme-t-il les dangers de la passion amoureuse ?

Annonce du plan linéaire

Nous pouvons distinguer trois mouvements dans cet excipit :

  • Le premier long mouvement, de « M. de Nemours » à « changer de dessein », dépeint la tentative désespérée du duc pour revoir la princesse de Clèves (I)
  • Dans le deuxième et bref mouvement de l’extrait, de « Enfin » à « sa passion », la passion du duc s’éteint (II)
  • Enfin, le dernier mouvement du texte, de « Mme de Clèves » à la fin, évoque la mort vertueuse de la princesse de Clèves (III).

I – L’impossibilité du Duc de Nemours d’accéder à la Princesse de Clèves

De « M. de Nemours pensa expirer de douleur » à « capable de la faire changer de dessein« 

Ce passage montre la dernière tentative désespérée du duc de Nemours pour accéder à la princesse de Clèves qui s’est retirée « vers les Pyrénées », « dans une maison religieuse ».

La princesse a demandé à l’une de ses dames de servir d’intermédiaire, afin d’éviter tout contact avec le duc.

Le pronom démonstratif « celle » dans l’expression « celle qui lui parlait » indétermine cette interlocutrice : il s’agit d’une personne anonyme qui empêche les deux personnages de se rencontrer.

La parole entre le duc et la princesse de Clèves est ainsi une parole rapportée comme le souligne le discours indirect : « Cette personne lui dit que Mme de Clèves lui avait non seulement défendu…« .

L’intransigeance de la princesse est renforcée par la gradation : « lui avait non seulement défendu » « mais même de lui rendre compte » qui rend compte de sa détermination à ne plus entrer en contact avec le duc.

Nemours en éprouve une douleur intense comme en atteste les expressions hyperboliques « M. de Nemours pensa expirer de douleur » et un peu plus loin « accablé de douleurs« .

L’énumération ternaire exprime également l’amour de façon hyperbolique : « passion la plus violente, la plus naturelle et la mieux fondée »

Désespéré, le duc de Nemours se montre insistant : « il la pria vingt fois« , et plus tard dans l’extrait « Néanmoins, il ne se rebuta point encore« .

Le verbe « prier » pour évoquer la supplication amoureuse du duc inscrit déjà cet épilogue dans une atmosphère religieuse. La prière du duc de Nemours n’est toutefois qu’une prière mondaine d’une homme de cour qui s’oppose à « l’austère devoir » de la princesse.

La tournure impersonnelle « Il fallut enfin que ce prince repartît », soulignée par une allitération en « f », exprime bien l’échec de l’assaut amoureux du duc et la disparition de ce dernier.

La distance impersonnelle de l’article indéfini « un » dans « un homme qui perdait toute sorte d’espérance… » et « une personne » contribue à effacer peu à peu Nemours en faisant de lui une allégorie de l’amour souffrant.

II – La disparition de la passion amoureuse du Duc de Nemours

De « Enfin, des années entières s’étant passées » à « éteignirent sa passion« 

Dans le deuxième mouvement de cet excipit, très court, le duc parvient à dépasser sa souffrance amoureuse : « Enfin, des années entières s’étant passées, le temps et l’absence ralentirent sa douleur et éteignirent sa passion. »

La métaphore du feu amoureux qui s’éteint souligne que le duc de Nemours n’est pas un héros tragique qui ne survit pas à sa passion. Au contraire, le duc incarne le principe de réalité : avec « le temps et l’absence« , sa passion disparaît.

Cette vision de l’amour est pessimiste : la fin de la « folle et violente passion » du duc est scellée en une seule phrase, donnant raison à la princesse de Clèves qui avait conscience que l’amour ne dure pas.

Contrairement aux romans-fleuves en vogue à l’époque qui idéalisaient l’amour (comme l’Astrée de d’Urfé), Madame de la Fayette fait preuve d’un pragmatisme tragique en dépeignant l’amour dans son imperfection et sa fragilité.

III – Une fin morale

(De « Mme de Clèves vécut d’une sorte » jusqu’à « laissa des exemples de vertu inimitables« )

Les deux dernières phrases du roman se concentrent sur l’héroïne qui fait preuve d’une vertu exemplaire.

Le champ lexical de la religion montre que La princesse de Clèves consacre le reste de sa vie à Dieu : « maison religieuse« , « retraite« , « saintes« , « austères« , « vertu« .

L’amour de Dieu exclut toute vie mondaine : « Mme de Clèves vécut d’une sorte qui ne laissa pas d’apparence qu’elle pût jamais revenir. » La négation « jamais » souligne que La Princesse quitte définitivement la Cour et, métaphoriquement, la Carte du Tendre (carte imaginaire retraçant les étapes de la vie amoureuse selon les Précieuses du XVIIème siècle).

La vertu de la princesse est édifiante comme l’indique le comparatif et superlatif de supériorité qui accompagnent les adjectifs « saintes » et « austères » : « dans les occupations plus saintes que celles des couvents les plus austères« .

La mort précoce de l’héroïne est rendue encore plus frappante par la spectaculaire accélération du temps à la fin du roman : « et sa vie, qui fut assez courte« .

Cette mort précoce associée au champ lexical de la religion contribue à rapprocher la destinée de la princesse de Clèves à celle d’une sainte chrétienne.

On observe là l’influence janséniste de Madame de la Fayette qui suggère que la rédemption est possible pour ceux qui mènent une vie austère, rigoureuse et retirée du monde.

La fermeté morale de la princesse de Clèves offre également un contraste saisissant avec la disparition progressive de la passion du duc de Nemours : alors que la passion amoureuse cesse, l’amour divin est durable et guide une vie.

Le renoncement de la princesse, qui permet sa rédemption, avait suscité des débats littéraires à l’époque de publication. La princesse n’avait en effet péché que par sentiment. Ce refus moral de vivre son amour avec le duc peut également se lire comme une incapacité de la princesse à accepter et à affronter le réel.

La phrase finale de La princesse de Clèves montre la vocation moralisatrice et chrétienne du roman qui offre au lecteur un exemple de vertu : la princesse de Clèves « laissa des exemples de vertu inimitable. »

La Princesse de Clèves, excipit, conclusion

Madame de La Fayette achève son roman en affirmant l’impossibilité de la passion amoureuse.

Si la souffrance amoureuse du duc de Nemours s’amenuise jusqu’à disparaître complètement, l’austérité religieuse de le princesse de Clèves offre en contraste un exemple de vertu chrétienne rédemptrice.

Cette œuvre s’inscrit dans un pessimisme moral teinté de jansénisme propre à cette époque, et auquel participent notamment les Maximes de La Rochefoucault, moraliste proche de Madame de Lafayette.

Lire cet excipit de La princesse de Clèves en miroir de son incipit qui louait « La magnificence et la galanterie » révèle la dynamique de dégradation qui structure ce roman.

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Qui suis-je ?

Amélie Vioux

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7 commentaires

  • Bonjour emilie,
    Je suis en candidat libe et je voudrais savoir si on peut mettre cet extrait dans le récapitulatif des textes étudiés même si il est très court (14 ligne) ?,
    Merci!

    • Bonjour Max,
      Oui, tu peux présenter cet extrait, même s’il ne fait que 15-20 lignes. Il est suffisamment riche à commenter pour tenir 10 minutes.

  • Bonjour Amélie, pouvez-vous, s’ils vous plait, faire l’analyse linéaire du renoncement de La Princesse de Clèves au Duc de Nemours,
    Merci beaucoup.

  • La scène que mon professeur nous a donné c’est « La Princesse de Clèves renonce au Duc de Nemours » et je n’ai pas trouvé de lecture linéaire pour cette scène en particulier. Ça m’embête parce qu’imaginez si l’examinateur me dit que j’ai cette scène pour l’oral, la seule que je n’ai pas apprise à cause de l’absence de lectures linéaires, ça serait très ennuyeux pour moi 🙂

    • Bonjour !
      Cette année (exceptionnellement), l’examinateur te laissera le choix entre deux textes. Tu peux donc, éventuellement, faire l’impasse sur un texte (mais dans ce cas, sois sûre de connaître parfaitement les autres !).
      Si ça t’angoisse trop, tu peux toujours faire une recherche internet par mot-clés (« Princesse Clèves Lafayette commentaire linéaire + [extrait ou chapitre/partie] »). Tu trouveras forcément au moins un résultat pouvant t’aider. Tu peux également essayer de joindre ton (ou ta) professeur•e de français, ou revoir tes cours sur ce chapitre. (:

      En espérant avoir pu t’aider,
      Bon courage pour tes révisions…! ^^

  • Bonjour Amélie le problème c’est que mon texte commence à partir de « Enfin monsieur de Nemours… » c’est à dire avant et je ne trouve pas d’autres études linéaires dessus.

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