Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, articles 12 à 17 : analyse

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déclaration des droits de la femme et de la citoyenne articles 12 à 17

Voici un commentaire linéaire pour l’oral des articles 12 à 17 de la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne d’Olympe de Gouges.

Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, articles 12 à 17 : introduction

Né en 1748, Marie Gouze est mariée à 16 ans et trouve quelques années plus tard, grâce au veuvage, une liberté inattendue.

Elle prend alors le nom d’Olympe de Gouges et monte à Paris poursuivre une carrière littéraire.

Son écrit le plus célèbre, la Déclaration des droits de la Femme et de la Citoyenne date de 1791.

Il s’agit d’une réécriture de la la Déclaration des droits de l’homme et du Citoyen (DDHC) de 1789.

La DDHC de 1789 pose les droits fondamentaux de la nouvelle société politique.

Mais Olympe de Gouges réécrit ce texte juridique fondateur car elle lui reproche de ne pas avoir tenu ses promesses d’égalité et de liberté à l’égard des femmes. (Voir ma fiche de lecture sur la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne).

Nous étudierons ici les articles 12 à 17 de cette Déclaration.

Extrait analysé

Article 12. La garantie des droits de la femme et de la citoyenne nécessite une utilité majeure ; cette garantie doit être instituée pour l’avantage de tous, et non pour l’utilité particulière de celles à qui elle est conférée.

Article 13. Pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses d’administration, les contributions des femmes et des hommes sont égales ; elle a part à toutes les corvées, à toutes les tâches pénibles, elle doit donc avoir de même part à la distribution des places, des emplois, des charges, des dignités et de l’industrie.

Article 14. Les citoyennes et citoyens ont le droit de constater par eux-mêmes ou par leurs représentants la nécessité de la contribution publique. Les citoyennes ne peuvent y adhérer que par l’admission d’un partage égal, non seulement dans la fortune, mais encore dans l’Administration publique et de déterminer la quotité, l’assiette, le recouvrement et la durée de l’impôt.

Article 15. La masse des femmes, coalisée pour la contribution à celle des hommes, a le droit de demander compte à tout agent public de son administration.

Article 16. Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de constitution. La constitution est nulle si la majorité des individus qui composent la Nation n’a pas coopéré à sa rédaction.

Article 17. Les propriétés sont à tous les sexes réunis ou séparés : elles sont pour chacun un droit inviolable et sacré ; nul ne peut être privé comme vrai patrimoine de la nature, si ce n’est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment et sous la condition d’une juste et préalable indemnité.

Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, 1791.

Problématique

En quoi les articles 12 à 17 de la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne réfléchissent-ils au rôle politique de la femme dans la société ?

I – L’article 1 : la garantie des droits de la femme

L’article 12 de la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne reprend la structure syntaxique de l’article 12 de la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen mais en détourne complètement le sens.

En effet, l’article 12 de la DDHC prévoit un pouvoir de police nécessaire à la garantie des droits de l’homme.

Or Olympe de Gouges remplace le groupe nominal « force publique » de la DDHC par « utilité majeure » : « La garantie des droits de la femme et de la citoyenne nécessite une utilité majeure. »

Elle ne s’intéresse ainsi plus à l’instauration concrète d’un pouvoir de police mais à la dimension morale de la garantie des droits de la femme.

Elle considère en effet que la garantie des droits de la femme est un avantage pour la société comme en témoigne le champ lexical du libéralisme : « utilité », « majeure », « avantage de tous », « utilité particulière ».

Selon l’idéologie libérale en vogue à la fin du 18ème siècle, la somme du bien-être individuel constitue le bien-être collectif et le bonheur de tous.

Olympe de Gouges utilise cette doctrine pour faire valoir le droit des femmes : la garantie de leurs droits bénéficiera à l’ensemble de la société.

Mais contrairement aux droits de l’homme, le droit des femmes reste encore à élaborer comme le montre l’emploi du verbe devoir : « doit être instituée ».

II – Les articles 13 à 15 : une conception distributive de la justice

L’article 13 de la DDHC de 1789 pose le principe de l’obligation fiscale (« une contribution commune est indispensable») et de la proportionnalité de l’impôt (« en raison de leurs facultés »).

Olympe de Gouges modifie profondément le sens de cet article. Dans son article 13 de la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, elle s’intéresse non pas au principe de contribution mais à la qualité des contributeurs : « les contributions de l’homme et de la femme sont égales ».

Pour justifier cette égalité, Olympe de Gouges dresse un tableau éclair de la condition féminine à travers un registre tragique : « corvées », « tâches pénibles ». Le déterminant « toutes » donne un caractère hyperbolique à cette soumission de la femme au modèle patriarcal.

Olympe de Gouges place ainsi la femme dans une situation de créditrice : puisqu’elle se charge des tâches pénibles, elle doit recevoir le salaire de ses corvées. Le connecteur logique de conséquence (« elle doit donc avoir… » ) insiste sur la logique de son propos.

L’auteure reprend l’énumération des droits évoqués dans l’article 6 de la DDHC : « distribution des places, des emplois, des charges, des dignités et de l’industrie ».

On note qu’elle ajoute aux droits évoqués dans la DDHC, l’ « industrie » qui désigne au 18ème siècle toute activité productive (au-delà de ce que nous appelons aujourd’hui industrie) et qui permet subtilement d’introduire tout travail exercé par les femmes, même gratuitement.

Le terme « distribution » souligne la conception distributive de la justice partagée par Olympe de Gouges : il s’agit de répartir les biens, dignités et emplois en fonction du mérite et de la valeur de chacun.

En mentionnant « les emplois, les charges et les dignités« , Olympe de Gouges attribue aux femmes un droit au travail salarié et souhaite ainsi les libérer du travail exclusivement domestique exercé à titre gratuit.

L’article 14 de la DDHC de 1789 ajoute à la nécessité de l’impôt de consentement fiscal : «Tous les citoyens ont le droit de constater la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement».

Si Olympe de Gouges réaffirme le principe de nécessité de la contribution, elle supprime la notion de consentement fiscal pour insister sur l’égalité de la charge fiscale «Les citoyennes ne peuvent y adhérer que par l’admission d’un partage égal, non seulement dans la fortune mais encore dans l’administration publique».

Olympe de Gouges raccroche à la fin de son article 14 la proposition finale de l’article 14 de la DDHC : « et de déterminer la quotité, l’assiette, le recouvrement et la durée de l’impôt ». Néanmoins, ce raccrochage se fait au prix d’une anacoluthe (rupture syntaxique), ce qui montre la distance ironique que prend Olympe de Gouges avec le texte de la Révolution qui n’a pas tenu ses promesses.

L’article 15 de la DDHC de 1789 prévoit que « La Société a le droit de demander compte à tout Agent public de son administration.« 

Olympe de Gouges remplace la « Société » par la « masse des femmes, coalisée pour la contribution à celle des hommes ». Cette périphrase est beaucoup moins neutre que « société » et reprend une sémantique révolutionnaire à travers les mots « masse » et « coalisée » qui suggèrent une alliance ou un pacte.

Cette périphrase montre bien l’état d’esprit d’Olympe de Gouges lorsqu’elle rédige sa Déclaration : les femmes doivent se battre pour défendre leur condition.

III – L’article 16 : La Constitution doit être élaborée par l’ensemble des citoyens

L’article 16 de la Déclaration des droits de la femme reprend littéralement tout l’article 16 de la DDHC de 1789. Cet article prévoit la garantie des droits et la séparation des pouvoirs.

En revanche, Olympe de Gouges ajoute une mention de son cru qui modifie la théorie de la représentation héritée de Rousseau dans Du Contrat social (1762) : « la Constitution est nulle, si la majorité des individus qui composent la nation, n’a pas coopéré à sa rédaction.« 

Le terme juridique « nulle » est fort : il frappe de nullité toute Constitution où la majorité des individus qui compose la nation n’aurait pas « coopéré » à sa « rédaction ».

Par le terme « individu » – remplaçant celui plus attendu de « citoyen » – Olympe de Gouges met l’homme et la femme sur un pied d’égalité.

Elle efface la distinction sexuelle pour montrer que l’un comme l’autre ont un égal accès à la citoyenneté politique.

Elle rappelle également que les hommes seuls ne constituent pas la majorité de la Société. Cet article est audacieux puisqu’Olympe de Gouges affirme la nullité de la Constitution révolutionnaire, les femmes n’ayant pas participé à son élaboration.

La femme, comme l’homme, doit être une citoyenne active, co-rédactrice du texte constitutionnel.

IV – Articles 17 : le droit à la propriété

L’article 17 qui vient clore la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne reprend la structure syntaxique de l’article 17 de la DDHC de 1789.

Il modifie toutefois de manière significative certains mots.

Ainsi, Olympe de Gouges remplace la « propriété » de la DDHC par « Les propriétés» au pluriel.

Surtout, elle attribue la propriété non pas au foyer conjugal mais aux individus qui peuvent vivre « séparés » : « Les propriétés sont à tous les sexes réunis ou séparés » .

Olympe de Gouges crée une rupture avec la conception traditionnelle de la famille où la propriété appartient au père de famille.

Le caractère « inviolable et sacré » que la DDHC attache à la propriété et associé par Olympe de Gouges au propriétaire, qui peut être un homme ou une femme.

Elle ajoute une proposition assez énigmatique « comme vrai patrimoine de la nature » qui témoigne d’un changement de philosophie. Pour Olympe de Gouges, le « patrimoine » traditionnel, attaché au père de famille, n’est pas le « vrai patrimoine de la nature » qui ne crée pas de différence entre les sexes dans l’accès à la propriété.

Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, articles 11 à 17 : conclusion

Les articles 12 à 17 de la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne soulignent que le rôle politique des femmes est à parfaire.

En réécrivant la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, Olympe de Gouges corrige les manques de ce texte juridique et ajoute des notions qui permettent de créer une égalité entre l’homme et la femme.

Dans le postambule, elle va s’adresser directement aux femmes pour leur insuffler la colère contre l’ingratitude des hommes et le courage de faire valoir leurs droits dans un combat politique.

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Qui suis-je ?

Amélie Vioux

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