Dissertation sur Le Rouge et le Noir

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dissertation sur le rouge et le noirVoici un exemple de dissertation niveau bac de français sur Le Rouge et le Noir de Stendhal.

Tu peux trouver ici des exemples de dissertation sur les autres oeuvres au programme de l’EAF.

Sujet de dissertation sur Le Rouge et le noir – Parcours : Le personnage de roman, esthétique et valeurs

 Faut-il s’identifier à un personnage pour être captivé par un roman ou un récit ?

Vous répondrez à cette question en vous fondant sur votre connaissance de l’œuvre Le Rouge et le Noir de Stendhal, des textes étudiés pendant l’année ainsi que sur vos lectures personnelles. 

Remarques préalables

Ce sujet se compose d’une question fermée qui conduit à un plan dialectique.

Même si cette dissertation porte sur Le Rouge et le Noir de Stendhal, pense à mobiliser ta culture littéraire au sens large pour répondre à ce sujet.

Ainsi, dans cette dissertation, seulement un tiers de mes exemples sont issus du Rouge et le Noir. Tous les autres exemples sont tirés d’autres romans.

Je te donne des indications concernant les grandes parties du plan (I, II, III) et les sous-parties (A, B, C) afin de faciliter ta lecture. Le jour du bac, ces titres ne doivent pas apparaître sur ta copie.

Introduction

Lorsque Flaubert dit « Madame Bovary, c’est moi », il révèle le rapport fusionnel qu’il entretient avec son personnage, centre de gravité du roman autour duquel tout tourne. Il semble alors naturel pour le lecteur de s’identifier lui aussi au personnage pour accéder au sens du roman. [Amorce]

Mais est-il nécessaire de s’identifier à un personnage pour être captivé par un roman ? L’intérêt du lecteur pour un roman est-il réductible à son identification à un personnage ? [Problématique]

Si l’identification à un personnage permet indéniablement au lecteur d’être captivé par un roman, la mise à distance avec les personnages peut être tout autant un motif d’intérêt. Mais au-delà du personnage, ne serait-ce pas surtout l’univers autour du personnage qui captive le lecteur ? [Annonce du plan]

I – L’identification à un personnage permet de captiver le lecteur

A – L’identification à un personnage est une source de plaisir pour le lecteur qui ressent les émotions du personnage et revit même parfois à travers lui des émotions déjà vécues.

L’identification est particulièrement favorisée lorsque le lecteur suit le parcours social d’un personnage dans un roman d’apprentissage. En effet, la temporalité longue des romans d’apprentissage crée un attachement au héros dont le lecteur suit la formation de jeune adulte, la progression dans la société et son évolution personnelle.

Dans Le Rouge et le Noir de Stendhal par exemple, le lecteur fait connaissance avec Julien Sorel au chapitre IV du livre premier. Julien est alors une jeune homme de dix-neuf ans, « faible en apparence », délicat, entouré d’un père et de frères grossiers qui le rouent de coups. Parce qu’il apparaît comme une victime, Julien attire immédiatement la sympathie du lecteur, lançant ainsi le processus d’identification. Le lecteur est alors captivé par l’ascension sociale de ce jeune homme qui devient un précepteur à la mode à Verrières, entre au grand séminaire de Besançon puis se fait remarquer à Paris dans le milieu aristocratique.

L’identification avec le personnage est facilitée par le regard omniscient du narrateur qui analyse l’âme et les pensées de Julien Sorel : « Mais tout à coup, Julien fut heureux, il avait une raison pour refuser ? Quoi je perdrais lâchement sept à huit années ! » (Ière partie, chapitre 12). Cet accès aux pensées du personnage permet une identification captivante pour le lecteur.

B – Ce sont aussi les difficultés rencontrées par le personnage, et même ses échecs, qui favorisent le processus d’identification.

Lorsqu’un personnage rencontre des difficultés, le lecteur éprouve de l’empathie, et cette empathie le pousse à poursuivre la lecture pour savoir si le personnage parviendra à surmonter l’adversité.

Dans L’Assommoir de Zola par exemple, Gervaise est dans une situation tragique : ouvrière courageuse, travailleuse, honnête, elle ne peut échapper ni à son hérédité (ses parents sont alcooliques) ni à son milieu social qui exerce sur elle une action destructrice. Le lecteur ne peut que fraterniser avec Gervaise et s’intéresser à son histoire.

De même, dans Madame Bovary de Gustave Flaubert, l’héroïne va elle aussi d’échec en échec. Jeune femme rêveuse à l’esprit romantique, Emma Bovary n’arrive pas à s’adapter à la vie plate et prosaïque que lui offre son mari Charles. Elle prend des amants, s’endette et finit pas se suicider.

La fragilité d’Emma et ses déceptions la rendent proche du lecteur qui poursuit le roman jusqu’à la fin pour savoir comment se termine l’histoire.

C – Un personnage peut aussi être captivant s’il représente un modèle pour le lecteur.

Dans La Peste d’Albert Camus, le fléau de la Peste qui s’abat sur la ville d’Oran symbolise le mal qui touche les hommes aveuglément. Les différents personnages du roman incarnent des réactions possibles face au Mal. Le Père Paneloux se réfugie dans la religion, voyant la peste comme une punition divine. Cottard tente de se suicider et le journaliste Rambert cherche tout d’abord à quitter la ville. Mais le personnage central du roman, le médecin Rieux, témoigne d’une humanité et d’une solidarité sans faille envers les hommes. Il lutte contre le mal en soignant les autres et fait preuve de bonté, de lucidité et d’honnêteté.

Le personnage du médecin Rieux favorise l’identification car il représente pour le lecteur un modèle d’humanité inspirant et digne d’admiration.

Transition : Si l’identification au personnage de roman est un moteur romanesque, c’est parfois la non identification avec le personnage qui intéresse le lecteur.

II – La distance avec le personnage de roman est paradoxalement un moyen de capter l’attention du lecteur

A – Le lecteur peut être captivé par des personnages antipathiques

En général, il est impossible à un lecteur de s’identifier à des personnages négatifs ou immoraux. Pourtant, cela ne l’empêche pas d’être captivé par des romans dont le héros est antipathique.

Ainsi, Jean-Baptiste Clamence, le personnage de La Chute, n’est pas présenté par Albert Camus sous son meilleur jour : sûr de lui, parfois arrogant, animé par un amour immodéré de soi, ce protagoniste ne déclenche pas chez le lecteur le processus d’identification. Néanmoins, son statut d’anti-héros suscite de l’intérêt et donne envie au lecteur de continuer la lecture pour suivre la chute de ce personnage.

Il en va de même avec les héros des Liaisons dangereuses de Laclos. Le Vicomte de Valmont et la Marquise de Mertueil sont deux libertins qui fomentent des plans machiavéliques pour piéger leurs victimes. Le lecteur ne s’identifie pas à ces personnages immoraux mais il est captivé par leur capacité à faire le mal et par leur chute inéluctable.

C’est ainsi la non-identification avec les personnages qui tient le lecteur captif.

B – Les auteurs créent eux-mêmes un effet de distance entre le lecteur et le personnage quand ils utilisent l’ironie à l’égard de leurs personnages.

Dans Le Rouge et le Noir par exemple, Stendhal porte souvent un regard ironique sur Julien, invitant le lecteur à se détacher du jeune héros.

Lorsque Julien séduit Mme de Rênal au chapitre IX du livre premier, le narrateur utilise le champ lexical du devoir et du combat ce qui prête à sourire. De même, Julien promet de se faire « brûler la cervelle » s’il ne parvient pas à saisir la main de Mme de Rênal. Une réaction aussi extrême ridiculise le personnage. Le narrateur n’hésite pas à s’inviter dans le récit pour se moquer des choix du héros, comme au chapitre 14 du livre I où Julien se montre gauche séducteur : « Sans cette sottise de faire un plan, l’esprit vif de Julien l’eût bien servi ».

Par le procédé de l’ironie, Stendhal nous invite ainsi à garder de la distance vis-à-vis de Julien, comme s’il fallait se prévenir de toute identification pour mieux suivre le parcours de ce personnage-témoin dans la société du XIXème siècle.

C – C’est parfois la disparition même du personnage qui constitue l’intérêt d’un roman.

Dans les années 1950, les auteurs du Nouveau Roman font disparaître leurs personnages derrère les objets ou derrière un sentiment d’étrangeté.

Dans Enfance de Nathalie Sarraute ou L’Amant de Marguerite Duras, les personnages sont vus en focalisation externe si bien que le lecteur n’accède pas à leurs pensées. L’auteur s’attache aux ambiances, à l’atmosphère qui règne entre les personnages et refuse toute approche psychologique. Cette disparition du personnage, parfois déconcertante, crée un effet d’énigme intrigant pour le lecteur.

Transition : Le lecteur s’intéresse donc à des romans où l’identification avec le personnage n’est pas possible, signe que l’intérêt du lecteur pour l’œuvre ne dépend pas forcément des personnages. Mais alors quels éléments du roman permettent de capter l’attention du lecteur ?

III – Réduire l’intérêt du lecteur à l’identification à un personnage ne permet pas de rendre compte de la complexité du roman et des multiples raisons qui motivent le plaisir de la lecture.

A – Au-delà du personnage, le lecteur s’intéresse à la peinture sociale proposée par un roman, à l’opportunité qu’il offre de se plonger dans une autre époque.

Ainsi, Stendhal considère que le roman est un « miroir qui se promène sur une grande route » : les personnages ne sont alors plus que les pièces d’une fresque sociale. Le sous-titre du Rouge et le Noir, « Chroniques de 1830 », marque d’ailleurs la volonté de dépeindre la comédie sociale qui se joue pendant la période de la Restauration.

De même, les cinquante pages de description qui ouvrent le Père Goriot soulignent la volonté de Balzac de prévenir toute identification, toute séduction à l’égard d’un personnage pour forcer le lecteur à un regard froid et objectif sur la société.

B – Le lecteur s’intéresse aussi aux romans vecteurs d’une philosophie car ils portent une réflexion sur le monde de manière plus captivante qu’un traité de philosophie.

Un conte comme Candide ou l’optimisme intéresse le lecteur car il condense la pensée de Voltaire de manière plus enlevée et plaisante qu’un traité abstrait. Voltaire utilise son récit et ses personnages pour critiquer l’optimisme du philosophe Leibnitz et le Providentialisme. Il y oppose une vision lucide des imperfections du monde et affiche sa confiance en l’homme capable d’améliorer sa condition.

On songe aussi à Sartre qui dans son roman La Nausée nous délivre sa conception de l’existentialisme. La vie d’Antoine Roquentin, son mal de vivre et l’expérience qu’il fait de l’absurdité et de la contingence de la vie nous permet de comprendre la philosophie existentialiste de Sartre de façon plus concrète et charnelle que ne le ferait un traité de philosophie.

Le roman propose une vision de la condition humaine, qui intéresse le lecteur.

C – Pour un lecteur, un roman peut aussi avoir un autre attrait que le fond : celui de la forme, c’est à dire du style d’écriture.

Le roman permet en effet d’entrer en résonance avec la voix singulière d’un auteur.

Chez Marcel Proust par exemple, ce n’est pas l’intrigue ou le personnage principal qui est le moteur principal de son œuvre A la recherche du temps perdu mais plutôt sa peinture du monde telle que la conscience subjective l’appréhende. Proust écrit de longues phrases complexes, « vivantes », qui épousent le rythme de le pensée et des émotions. C’est la singularité de son style et la musicalité de ses longues phrases qui enchantent les lecteurs et font de Proust l’un des auteurs les plus traduits dans le monde.

Au contraire de Proust, Jean Giono écrit le plus souvent avec des phrases courtes. Dans son roman Regain par exemple, il donne en peu de mots des images fortes, lyriques et poétiques de la nature qui touchent le lecteur.

Dans un autre registre, le style oralisé et argotique de Céline dans son roman Voyage au bout de la nuit choque et fascine à la fois. C’est cette écriture brutale et convulsive qui est le moteur du roman et entraîne le lecteur dans cette épopée moderne.

 Conclusion

Les lecteurs étant divers et le roman étant un genre aux formes multiples, les raisons pour lesquelles un lecteur peut être captivé par un roman sont nombreuses : identification aux personnages ou au contraire distanciation, découverte de la société, de la nature humaine, d’une vision du monde, d’une époque historique, ou encore attrait pour le style d’un auteur. Le personnage n’est donc pas forcément le centre de gravité du roman. [Bilan du raisonnement et réponse finale à la question]

La tendance contemporaine à l’autofiction, dans laquelle l’auteur met en scène sa propre vie de façon romancée, n’est-elle toutefois pas le signe du renouveau du personnage dans les romans du XXIème siècle ? [ouverture]

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Amélie Vioux

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5 commentaires

  • Bonsoir, j’ai des devoirs a faire sur le livre de Julien sorel, rouge et noir et j’arrive pas a développer mes idées je suis perdu dans mes devoirs. La question c’était de se mettre dans la peau de l’avocat qui défend Julien sorel

  • Bonjour Madame,
    Merci beaucoup pour vos corrigés de dissertation qui sont très instructifs !
    Pour les plans dialectiques est-il possible de faire un plan dans lequel nous mettrions en première partie « oui… » et en deuxième « mais…. » ? Est-ce bien la même chose que thèse et antithèse?
    Merci beaucoup

Répondre à Lea X