Dissertation sur Pour un oui ou pour un non !

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Voici une dissertation sur Pour un oui ou pour un non de Nathalie Sarraute (parcours au bac de français : Dispute et théâtre).

Important : Pour faciliter ta lecture, le plan de cette dissertation est apparent et le dĂ©veloppement est prĂ©sentĂ© sous forme de liste Ă  puces. N’oublie pas que le jour J, ton plan et ton dĂ©veloppement doivent ĂŞtre intĂ©gralement rĂ©digĂ©s. Tu trouveras ici un exemple de dissertation rĂ©digĂ© comme tu dois le faire le jour du bac.

Sujet de dissertation :

Pourquoi se dispute-t-on dans Pour un oui ou pour un non ?

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Introduction

La dispute est un thème théâtral fécond.

Marivaux, dès le XVIIIème siècle, en a fait le sujet d’une comédie, La dispute, et Nathalie Sarraute, dans son sillage, met en scène les retrouvailles de deux amis, H1 et H2, qui vont évoluer vers une altercation.

Mais pourquoi se dispute-t-on dans Pour un oui ou pour un non ? Le motif invoquĂ© par les personnages n’est-il pas un prĂ©texte ? La vĂ©ritable raison de la dispute mise en scène par Nathalie Sarraute ne repose-t-elle pas en rĂ©alitĂ© sur la rivalitĂ© fondamentale entre les hommes ?

Tout porte à le croire car, comme le suggère le titre de la pièce, la dispute entre H1 et H2 semble ne reposer sur rien.

Nous verrons en effet que si la dispute apparaît sans motif apparent, elle est avant tout l’occasion d’un affrontement psychologique entre deux personnages qui ont une vision du monde opposée. Enfin, nous montrerons que cette dispute permet d’étudier l’homme dans toute sa vérité.

I – Une dispute sans motif sĂ©rieux apparent

A – Une amitiĂ© qui semblait solide

  • La dispute surprend car H1 et H2 sont unis par des liens d’amitiĂ© Ă©vidents. Leur proximitĂ© est ancienne et dure « depuis tant d’annĂ©es Â».

  • Chaque personnage livre un portrait flatteur de l’autre : H2 reconnaĂ®t que son ami a toujours Ă©tĂ© « très chic Â». H1 lui renvoie le compliment : « Toi aussi, tu as toujours Ă©tĂ© parfait Â». 

  • La mention de la mère de H2 (« Elle t’aimait bien Â») renforce cette impression de proximitĂ© voire de fraternitĂ© puisque les deux compagnons apparaissent comme des frères symboliques, transparents l’un Ă  l’autre : « je te connais trop bien Â» dit H1 Ă  H2, comme s’ils Ă©taient une seule et mĂŞme personne, indivisibles, et impermĂ©ables Ă  toute dispute.

  • De surcroĂ®t, l’amitiĂ© prend une expression presque amoureuse lorsque H1 utilise l’expression « rompre avec moi Â». Nathalie Sarraute joue ici avec le mythe de l’androgyne, cet ĂŞtre de la mythologie grecque originellement unifiĂ© mais sĂ©parĂ© en deux moitiĂ©s par Zeus. Cette lĂ©gende explique pourquoi, lorsque les deux parties distinctes de l’androgyne se retrouvent, l’amour naĂ®t.

B – Un motif de dispute qui relève de l’indicible

  • H1 questionne son ami (« que s’est-il passĂ© ? Â»), et cherche un « quelque chose Â» qui expliquerait la distance prise par H2. Or, la raison invoquĂ©e par H2 est « rien Â», repris anaphoriquement et invoquĂ© comme une litanie : « H1 : Alors ? Qu’est-ce qui se passera ? Tu me dis que ce n’est rien… H2 : Mais justement, ce n’est rien… Et c’est Ă  cause de ce rien…H1 : Ah on y arrive… C’est Ă  cause de ce rien Â».

  • Le motif de la dispute est donc flou et paraĂ®t d’une telle inanitĂ© qu’on ne parvient pas Ă  le nommer. Il est d’ailleurs caractĂ©risĂ© plusieurs fois par le pronom « Ă§a Â».

  • Puis H2 rĂ©vèle la phrase qui a initiĂ© la dispute : « C’est biiien…ça… Â». Nathalie Sarraute choisit des termes vagues, laudatifs du reste, pour souligner que cette dispute ne repose sur rien de tangible.

  • NĂ©anmoins, H2 relève l’ « intervalle Â» entre « bien Â» et « Ă§a Â», l’étirement du « i Â» dans « bien Â», et le « suspens Â» entre « bien Â» et « Ă§a Â». Le fondement de la dispute ne repose donc pas sur le sens des mots mais sur un ton, une articulation, un son, c’est-Ă -dire littĂ©ralement sur rien.

  • Cette futilitĂ© est comique : on sourit du dĂ©calage entre la violence de la dispute et le caractère dĂ©risoire de son explication. D’ailleurs, lorsque H3 et F analysent les faits, leur jugement traduit l’incomprĂ©hension du motif qu’ils trouvent « pour le moins excessif Â». La rĂ©plique de H3 « Pas grand-chose, en effet Â» (p. 35) fait Ă©cho au titre de la pièce « Pour un oui ou pour un non Â».

Transition : Malgré l’insignifiance de l’explication, la dispute est réelle et enfle car derrière elle se dévoile une scission fondée sur l’affrontement psychologique des deux personnages.

II – Le motif rĂ©el de la dispute : l’affrontement psychologique des personnages

A – La dispute rĂ©sulte d’intentions inconscientes

  • Le motif de la dispute, insaisissable, indĂ©finissable, rappelle la dimension pulsionnelle de l’inconscient dĂ©fini par Freud dans Cinq leçons sur la psychanalyse. Derrière le langage conscient se cachent des intentions inconscientes, refoulĂ©es. D’ailleurs, l’emploi rĂ©current du pronom « Ă§a Â» dans la pièce rappelle la dĂ©nomination de l’inconscient par Freud : le « Ă§a Â», la partie inconsciente et primitive de la personnalitĂ©.

  • Ce double niveau de langage est au cĹ“ur de la pièce de Nathalie Sarraute. Ainsi, H2 va au-delĂ  de la signification première des mots (la fĂ©licitation du « C’est biiien, ça Â») pour dĂ©busquer l’intention rĂ©elle : la condescendance et le mĂ©pris. L’objet de la dispute n’est donc pas si anodin car derrière la politesse des mots se cache l’hostilitĂ© de l’intention.

  • Cette dispute illustre la notion de « tropismes Â» dĂ©finis par Nathalie Sarraute comme des « mouvements indĂ©finissables qui glissent très rapidement aux limites de la conscience Â». L’étirement du « i Â» dans « biiien Â» n’est donc pas « rien Â» : il pourrait manifester des sentiments inavouables et cachĂ©s. H2 devient un interprète des tropismes : il met en lumière la sous-conversation derrière les mots banals. La dispute trouve dès lors des fondements plus rĂ©els qu’on ne pouvait le croire.

B – La dispute met en relief deux personnalitĂ©s opposĂ©es

  • H2 incarne le sentiment et l’impulsivitĂ© : il s’adresse Ă  H1 par questions ou exclamation. Il s’oppose lui-mĂŞme Ă  un « vous Â» reprĂ©sentant pour lui le monde rationnel et concret : « on ne sait pas oĂą l’on est, mais en tous cas on n’est pas sur vos listes… Et c’est ce que vous ne supportez pas Â».

  • H1, lui, incarne une attitude bourgeoise Ă©prise de stabilitĂ©, de sagesse et de soliditĂ©.

  • Si H2 reprĂ©sente le « non Â» aux conventions sociales, H1 en symbolise le « oui Â». La dispute peut alors se lire comme un choix Ă  opĂ©rer entre le « oui Â» et le « non Â». Le spectateur est appelĂ© symboliquement Ă  choisir entre deux philosophies de vie irrĂ©conciliables : celle de la sensibilitĂ© poĂ©tique et Ă©corchĂ©e de H1 ou celle de la soliditĂ© et rationalitĂ© bourgeoises de H2.

Transition : La dispute est donc le rĂ©vĂ©lateur d’une fracture psychologique mais aussi sociologique entre deux personnages. La pièce va mĂŞme bien au-delĂ  : la dispute semble affirmer l’hostilitĂ© naturelle et irrĂ©mĂ©diable entre les hommes.

III – Finalement, le fondement de cette dispute ne rĂ©side-t-elle pas dans l’inconciliabilitĂ© naturelle des hommes ?

A – La dispute met en lumière le caractère inconciliable des hommes

  • La dimension tragique est Ă©vidente dans cette Ĺ“uvre. Sarraute reprend tout d’abord un topos de la tragĂ©die grecque, celui des frères ennemis : H1 et H2 sont deux amis liĂ©s par une amitiĂ© fraternelle qui va se muer en haine Ă©ternelle : « C’est un combat sans merci. Une lutte Ă  mort. Oui, pour la survie. Il n’y a pas le choix. C’est toi ou moi Â» (p. 45).

  • Ensuite, l’intrigue se dĂ©roule dans un monde clos, le logis de H2, telle la pièce de Jean-Paul Sartre, Huis-clos oĂą des personnages ruminent, dans un lieu fermĂ©, leur culpabilitĂ© passĂ©e. D’ailleurs, la dispute ne se conclut pas sur le dĂ©part d’un des personnages : malgrĂ© leur diffĂ©rend, ils semblent condamnĂ©s Ă  rester ensemble.

  • Enfin, comme dans une tragĂ©die, les personnages sont les jouets du destin. H1, plutĂ´t pacificateur, lance sans le savoir la machine infernale de la division : « je t’adjure solennellement, tu ne peux plus reculer Â». Les deux personnages sont alors entraĂ®nĂ©s malgrĂ© eux sur le chemin de la sĂ©paration et de l’inimitiĂ©. Lorsque la dispute semble s’apaiser, une simple remarque de H1 (« C’est de Verlaine, n’est-ce pas ? Â») la ravive comme de l’huile sur le feu. Ils se retrouvent prisonniers du langage car chacun est le traducteur de la parole de l’autre et nourrit le conflit quoiqu’il soit dit : « Si tu l’as dit, implicitement Â» affirme H1 Ă  H2.

B – La pièce est un laboratoire de l’âme humaine

  • La pièce s’apparente mĂŞme Ă  un vĂ©ritable laboratoire, comme si Nathalie Sarraute Ă©tait une scientifique qui Ă©tudiait la nature humaine. La dĂ©nomination des personnages va en ce sens : leurs noms H1, H2, H3, F les dĂ©shumanise : ils sont rĂ©duits Ă  l’état de choses ou de souris d’expĂ©rimentation qui ne seraient qu’étiquetĂ©es.

  • L’absence de didascalies pour prĂ©ciser la disposition des lieux ou la dĂ©coration de l’appartement renforce l’impression d’une action qui se dĂ©roule dans une pièce froide et minĂ©rale, oĂą sont enfermĂ©s des cobayes dont nous observons la rĂ©action. D’ailleurs, le terme « survie Â» employĂ© par H2 rappelle l’expression « la survie du plus apte Â» utilisĂ©e par Charles Darwin, naturaliste du XIXème siècle, pour expliquer sa thĂ©orie de la sĂ©lection naturelle.

  • Le spectateur, Ă  travers la dispute entre H1 et H2, n’assisterait-il pas Ă  l’expĂ©rience d’une sĂ©lection naturelle oĂą les hommes, en dĂ©pit des prĂ©cautions, de la politesse et des codes sociaux, sont dans un combat permanent pour ĂŞtre du cĂ´tĂ© des vainqueurs ou des « ratĂ©s Â» ?

Conclusion

La dispute constitue un moment de crise qui offre au dramaturge des potentialités inouïes.

Ainsi, derrière la comédie d’une querelle sans raison apparente se dessinent des fractures psychologiques et sociologiques entre deux hommes que tout oppose.

La dispute dans Pour un oui ou pour un non ne peut avoir de fin car elle n’a pas d’objet, de cause. Elle est « essentielle » en cela qu’elle est fondĂ©e sur l’essence mĂŞme de la nature humaine. C’est pour cela qu’elle est finalement une dispute expĂ©rimentale, destinĂ©e Ă  Ă©tudier l’homme et en rĂ©vĂ©ler la violence fondamentale.

Nathalie Sarraute dévoile ainsi une vision pessimiste des hommes, dont les conventions sociales et la politesse ne parviennent pas à cacher la violence naturelle. En cela, sa pièce rappelle En attendant Godot (1952) de Beckett, Vladimir et Estragon n’étant, à leur manière, que des H1 et H2.

Analyses linéaires sur Pour un oui ou pour un non :

Dissertations sur les autres oeuvres au programme :

Dissertations sur l’ancien programme :

Qui suis-je ?

Amélie Vioux

Professeure et autrice chez hachette, je suis spécialisée dans la préparation du bac de français (2nde et 1re).

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