Les femmes et le secret, La Fontaine : lecture linéaire

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les femmes et le secretVoici une analyse linéaire de la fable « Les femmes et le secret » issue du livre VIII des Fables de La Fontaine.

Les femmes et le secret, La Fontaine, introduction

Jean de La Fontaine est l’auteur d’une œuvre abondante, mais il est surtout connu du public pour ses fables, récits brefs et plaisants qui visent à délivrer une morale.

La Fontaine n’est pas l’inventeur de la fable, mais il renouvelle ce genre antique en l’égayant, en le transposant en vers et en faisant primer le plaisir du récit sur la moralité.

(Voir mon analyse des Fables livres 7 à 11 pour le bac de français)

« Les Femmes et le Secret » issu du livre VIII des Fables dénonce ainsi la crédulité et la traîtrise des femmes.

Problématique :

Comment cette fable comique dénonce-t-elle l’incapacité des femmes à garder un secret ?

Annonce du plan linéaire :

Après avoir affirmé l’incapacité des hommes à garder des secrets (I), le fabuliste raconte comment un mari confia à sa femme un secret absurde : il aurait pondu un œuf (II). L’épouse s’empresse alors de propager l’invraisemblable secret (III), qui se trouve alors largement répété (IV).

I – L’incapacité des hommes à garder un secret

(Vers 1 à 4)

Cette fable s’ouvre sur un aphorisme exprimé à l’aide d’un présent de vérité générale : « Rien ne pèse tant qu’un secret » (v.1).

Le pronom indéfini « rien » est hyperbolique et le verbe « peser » assimile le secret à un objet lourd : ce premier vers hyperbolique inscrit ainsi déjà cette fable dans le registre de la comédie.

Le récit qui suit va alors chercher à prouver la justesse de cet aphorisme.

Le deuxième vers file avec humour la métaphore entre le secret à un objet lourd : « Le porter loin est difficile aux dames ».

Le fabuliste prétend être personnellement renseigné sur l’incapacité des femmes à tenir un secret, ce qui crée une connivence avec le lecteur : « Et je sais même sur ce fait / Bon nombre d’hommes qui sont femmes. »

Notons l’usage de l’adverbe intensif « même » et de l’assonance en voyelles nasales (« bon », « nombre, « sont »), qui mettent en valeur le rapprochement « hommes / femmes »

Cette première phrase introductive soutient donc que les femmes, autant que les hommes, sont incapables de garder un secret.

II –  Un faux secret absurde

(Vers 5 à 13)

A partir du vers 5, commence un récit censé illustrer cette morale explicite, comme en témoigne le passage au passé simple (« un mari s’écria »).

L’enjambement (v.5-6) et le discours direct restitue l’agitation du mari : « « Ô Dieux ! qu’est-ce cela ? Je n’en puis plus ; on me déchire ; Quoi j’accouche d’un œuf ! » (v.6-8).

Ce discours en alexandrin est une parodie de la tragédie classique, car La Fontaine se plaît à employer de façon humoristique plusieurs procédés caractéristiques de la tragédie :
– L’apostrophe : « Ô dieux ! »
Les exclamations et interrogations : « Quoi ! » , « qu’est-ce que cela ? »
– Les stichomythies : « Quoi ! j’accouche d’un œuf ! – D’un œuf ? – Oui, le voilà » (v.8).

C’est bien entendu un mensonge que le mari adresse à sa femme, avant de lui demander de taire le curieux événement.

Son insistance auprès de sa femme pour garder ce secret se manifeste par la répétition d’hémistiches et par l’impératif : « Gardez bien de le dire » (v. 9), « Enfin, n’en parlez pas. » (v.10)

L’épouse naïve (v.11-12) « promit ses grands dieux de se taire » . L’évocation des « grands dieux » inscrit cette fable dans un contexte antique, période associée dans l’imaginaire à la rectitude morale.

Le sérieux du contexte renforce alors par contraste le comique de la fable.

Ici, le comique tient essentiellement à l’opposition entre l’absurdité du secret et le sérieux de l’épouse naïve.

III – La propagation du secret

(Vers 14 à 25)

Cependant, la femme ne tient pas son secret : « Mais ce serment s’évanouit / Avec les ombres de la nuit. » (v.14-15) La brièveté de ces octosyllabes à rime suivie exprime la facilité avec laquelle le secret est rompu.

En effet, l’épouse, qualifiée péjorativement d »indiscrète » (v.16) part répéter le secret « quand le jour fut à peine levé ». La locution adverbiale « à peine » renforce son empressement.

Au discours du mari invitant à la discrétion, s’opposent les révélations de sa traîtresse femme : « Ma commère, dit-elle, un cas est arrivé. » (v.19).

L’apostrophe dépréciative « Ma commère » participe au comique de cette fable qui tourne en ridicule la crédulité autant que la traîtrise des femmes.

Ainsi, la femme se contredit : « N’en dites surtout rien » (v.20). Par cet impératif, elle ordonne de taire le secret qu’elle propage !

A la trahison du secret s’ajoute son exagération : « Mon mari vient de pondre un œuf gros comme quatre. » (v.21).

Le terme de « mystère » (v.22) est particulièrement comique, puisqu’il fait référence aux cultes ésotériques antiques, tout en moquant la naïveté de l’épouse.

La commère l’assure par une question rhétorique qu’elle gardera le secret (« Vous moquez-vous ? », v.24), avant de la rassurer par un impératif : « Allez, ne craignez rien. » (v.25).

Cependant, la dynamique de propagation du secret a déjà été mise en place par le fabuliste. Le lecteur peut donc déjà s’imaginer la suite et s’en réjouir.

IV – La propagation exponentielle du secret

(Vers 26 à la fin)

Au vers 26, la périphrase comique « la Femme du pondeur » crée une complicité avec le lecteur, qui n’est pas dupe et sait que le mari n’a jamais pondu un oeuf.

La commère va alors « répandre en plus de dix endroits » (v.28) le faux secret.

Sa propagation est exponentielle, de même pour le nombre d’œuf pondus : « Au lieu d’un œuf, elle en dit trois. » (v.29). Se met ainsi en place un bouche-à-oreille inarrêtable de divulgations successives (v.31).

La confession est devenue discours public, ce que dénonce cette fable : « ce n’était plus un secret. »

Les quatre derniers vers (v.34-37) aux rimes embrassées expriment de manière hyperbolique la propagation du secret jusqu’à un degré absurde : « le nombre d’œufs […] se montaient à plus d’un cent. »

L’ironique « renommée » du secret n’est à aucun moment contredite par l’opinion, qui ne réalise pas l’absurdité du secret inventé par le mari, qui a ainsi démasqué sa femme.

Les femmes et le secret, La Fontaine, conclusion

Cette fable légère et misogyne met en œuvre un comique de situation et de langage afin de dénoncer la traîtrise et la crédulité des femmes, incapables de garder un secret, même lorsqu’il est invraisemblable.

Le moraliste pessimiste invite ainsi son lecteur à faire preuve de discrétion, même avec ses proches.

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